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RÉCITATIF, musique

En anglais recitative, en allemand Rezitativ, en italien recitativo, en espagnol recitado, récitatif, en français, désigne une forme d'expression vocale individuelle, propre à l'opéra et s'opposant à l'air — aria en italien. D'où les couples récitatifs-airs (recitativo-aria), fréquents dans le théâtre lyrique, notamment aux xviie et xviiie siècles, et caractéristiques de l'opera seria, leur opposition ne pouvant aller sans leur complémentarité ; en effet, le récitatif, parce qu'il est sans structure ou de structure libre, s'oppose aux formes chantées à structure fixe et prédéterminée. Par ailleurs, il n'a guère de raisons d'exister sans ces dernières, qu'il précède, en raison de son caractère transitoire et informel.

Son origine anticipe, à coup sûr, l'apparition de l'air : on le rencontre, sous des formes diverses et avec des typologies variées. Il peut prendre la forme « musicalisée » d'un texte, généralement poétique, d'essence liturgique ou profane ; il s'agit, dès lors, d'amplifier le sens des paroles ainsi que la modulation naturelle de la voix parlée, soit pour donner au texte religieux une plus grande résonance (exemple : le chant grégorien, où la ligne mélodique, seule et nue, suit pas à pas les méandres de la phrase et obéit aux impératifs de l'accentuation), soit pour agrandir le champ de rêve de la poésie et donner des sentiments exprimés une traduction plus intense (c'est le cas de la déclamation chantée et des recherches qui l'ont entourée, en Italie à la fin du xvie siècle, comme prémices à la naissance de l'opéra).

Le récitatif est donc lié à la fois à la mélodie rituelle, vocalisée ou non, et à la mélodie poétique, dont les trouvères et les troubadours avaient donné les premiers témoignages.

Par opposition à l'air, qui est mesuré, le plus souvent strophique et de forme symétrique (refrain, couplet, refrain...), le récitatif est un « espace de liberté », parfois non mesuré et quasi improvisé, sans forme définie et, surtout, d'une grande docilité au texte ; l'un — l'air — soumet le texte à la musique, l'autre — le récitatif — soumet la musique au texte.

L'intérêt du récitatif dans l'opéra ou l'oratorio s'est révélé multiple et important : il permet d'accélérer l'action en la résumant là où elle pourrait stagner, car son débit est beaucoup plus rapide que celui de l'air ; il conforte le dialogue, dans son naturel et sa vivacité, en rapprochant le chant du texte parlé ; il introduit un élément de diversion, là où une succession d'airs risquerait de paraître lassante.

Deux types de récitatifs sont à mentionner dès le xviie siècle : le recitativo secco (sec en français), vif, presque parlé, et le recitativo arioso (chanté), plus mélodique et moins vif, à mi-chemin entre le recitativo secco et l'aria. L'un et l'autre pouvaient être accompagnés (recitativo accompagnato ou stromento) ou non, le premier peu, ou seulement par le clavecin (accords égrenés entre les phrases, pour fixer un cadre harmonique et aider à la justesse), le second très souvent par tout ou partie de l'orchestre (les cordes, notamment, qui expriment l'harmonie et parfois le contrepoint, soutenant les intentions mélodiques du chanteur).

On en rencontre des exemples frappants dans les Passions de Bach (récits des évangélistes), dans les opéras de Mozart (conversations en musique), dans les opéras de Wagner (où il a tendance à se fondre avec l'air), dans ceux de Verdi (où il se définit de plus en plus nettement comme un parlando expressif sans romantisme), ou dans Pelléas et Mélisande de Debussy (où il prend le pas sur l'air, à l'intérieur d'une déclamation continue, sans frontières).

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Écrit par

  • : compositeur de musique, professeur au Conservatoire national supérieur de musique de Paris, lauréat de la Fondation de la vocation en 1969, directeur du Conservatoire municipal du XVIIe arrondissement de Paris

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