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RÉDUCTION PHÉNOMÉNOLOGIQUE ou TRANSCENDANTALE

Processus spécifique de la phénoménologie de Husserl, la réduction phénoménologique — ou réduction transcendantale — consiste en un effort pour arriver à la source de la signification du monde vécu à travers un mouvement qui fait qu'on cesse de voir celui-ci d'une manière naturelle et quotidienne pour le voir d'une manière réflexive en tant que phénomène pur ; une telle méthode implique la mise entre parenthèses de tous les jugements concernant l'existence du monde, c'est-à-dire une suspension (en grec épokhê) de tout jugement à propos de celle-ci de sorte qu'on ne la présuppose pas, ni ne la nie, ni ne l'affirme.

Le monde perçu selon l'attitude naturelle est celui des choses, des faits, des valeurs, des soucis et des buts pratiques, le monde dans lequel chacun vit, un monde préréflexif qui ne fait l'objet d'aucune réflexion radicale sur sa réalité, et à l'occasion duquel on n'examine ni la possibilité ou les fondements de la connaissance, ni la validité de la perception ; c'est donc un monde où les choses sont senties de manière immédiate. Le monde est continuellement là pour la personne qui vit de façon naturelle. Et, en tant qu'il est vu ainsi, il se situe au niveau ontique des étants (en allemand Seiendes) et des faits. Mais le même monde peut aussi être saisi d'une manière réflexive lorsqu'on l'examine comme un tout et qu'on s'interroge sur les fondements de la connaissance, afin de comprendre à la fois le monde et la conscience aussi bien que les rapports qu'ils entretiennent. Saisi de cette manière, le monde se situe au niveau ontologique de l'être (en allemand Sein) des étants et selon la signification (Sinn) du monde et de la conscience.

Modifiant ainsi l'attitude naturelle, la réduction phénoménologique vise à trouver pour la connaissance un fondement indubitable. Le monde, qui est continuellement là dans l'attitude naturelle, est alors mis entre parenthèses, opération qui n'est pas un déni du monde ni une mise en doute de son existence, mais plutôt une décision de ne porter aucun jugement sur le monde quotidien des choses et des faits. Cette modification d'attitude est appelée phénoménologique parce qu'elle amène à voir le monde comme un phénomène, c'est-à-dire comme quelque chose qui apparaît ; elle est appelée transcendantale parce qu'elle révèle ou découvre l'ego, pour lequel toute chose a un sens ; elle est appelée réduction parce qu'elle ramène à l'origine de la signification du monde.

Ainsi, tout en restant conscient de ce qui est mis entre parenthèses, on suspend sa croyance au sujet des contenus des phénomènes, tout en préservant encore leur essence à titre de pure possibilité. En tant qu'elle s'applique à l'objet, la réduction est donc une mise entre parenthèses et, en tant qu'elle s'applique à la conscience, une mise hors jeu ou une suspension.

—  ENCYCLOPÆDIA UNIVERSALIS

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  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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  • FORME

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    ...représentation mais intuition éidétique d'une position phénoménale. Pour conquérir ainsi une objectivité propre de l'apparaître, Husserl a dû s'appuyer sur l'épochè (la réduction phénoménologique) neutralisant la réalité externe. La conséquence en a été que, chez lui, la transcendance objective s'est disjointe...
  • ALTÉRITÉ, philosophie

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  • MÉDITATIONS CARTÉSIENNES, Edmund Husserl - Fiche de lecture

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    ...qu'empruntent les Idées directrices pour une phénoménologie (1913, traduites en 1950 par un autre des grands phénoménologues français, Paul Ricœur). Même distinguée de « la tentative cartésienne de doute universel », l'« épochè phénoménologique » ou « réduction transcendante », mise...
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