RÉFÉRENDUM
Une utilisation délicate
En plusieurs circonstances, en effet, le référendum a permis de résoudre des problèmes particulièrement épineux, par exemple celui de la question royale belge, en 1950. La Suède l'a utilisé à diverses reprises : en matière de circulation routière en 1954 et de pensions de vieillesse en 1957. La Suisse fait un large usage du référendum : sur le plan fédéral, une proposition constitutionnelle sur initiative populaire, relative à l'« emprise étrangère » (dite initiative Scharzenbach), a été rejetée le 7 juin 1970 ; en revanche, un référendum constitutionnel sur initiative gouvernementale, relatif au vote des femmes, a abouti à un succès le 7 février 1971. Sur le plan cantonal, ce procédé est d'un emploi très courant ; obligatoire en matière constitutionnelle, il l'est aussi, dans de nombreux cantons, dans le domaine législatif ; par ce biais, les électeurs du canton de Zurich ont accordé le droit de vote et d'éligibilité aux femmes, le 15 novembre 1970.
Des consultations de ce type permettent au peuple en corps de se prononcer sur un texte. Mais des déformations existent. Ainsi, sous les septennats du général de Gaulle, le référendum avait essentiellement pour objet d'aider le chef de l'État à surmonter des crises. Ses effets étaient surtout d'ordre thérapeutique, quant à une situation jugée par lui malsaine.
Qualités thérapeutiques
Un référendum, celui du 28 septembre 1958, est à l'origine de la Ve République. Son contenu est variable puisque trois significations sont attachées à ce vote : les électeurs métropolitains se prononcent sur un projet d'organisation des pouvoirs publics ; le « oui » ou le « non » des territoires d'outre-mer vaut acceptation ou refus d'entrer dans la Communauté ; le « oui » de l'Algérie signifie que l'évolution nécessaire de ce pays « doit s'accomplir dans le cadre français ». Le projet de constitution est adopté à une écrasante majorité.
La Constitution du 4 octobre 1958 décide, en son article 3, que la « souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum ». En matière constitutionnelle, cet article est de droit, à moins que le président de la République décide de soumettre le projet de révision aux deux chambres réunies en congrès (article 89). En matière législative, seuls certains projets de loi pourront en faire l'objet (article 11).
Depuis 1945, le référendum est « intimement lié à la notion de crise : il est le tremplin utilisé pour franchir les obstacles difficiles » (G. Bortoli) ; il constitue une « thérapeutique » (J.-M. Garrigou-Lagrange). En 1961 et 1962, le chef de l'État recourt au référendum pour régler le conflit algérien ; celui du 8 janvier 1961 aboutit à l'approbation de la politique d'autodétermination, celui du 8 avril 1962 à l'adoption des accords d'Évian.
Le référendum du 28 octobre 1962 intervient dans un climat dramatisé par le chef de l'État : il fait de l'élection du président de la République au suffrage universel l'enjeu de son conflit avec les partis politiques ; après la victoire, cette réforme deviendra une pierre angulaire du nouveau régime. Le référendum du 27 avril 1969 aura surtout pour objet de consolider un pouvoir ébranlé par les « événements » de mai 1968.
Le général de Gaulle provoquait les tempêtes ; par tempérament, Georges Pompidou préférait la mer étale. En 1972, la consultation relative à l'adhésion de la Grande-Bretagne au Marché commun visait avant tout à élargir les assises de la majorité présidentielle. Compte tenu du risque d'abstention élevée et de la recrudescence du rôle des partis, les consultations de 1988, sur le statut de la Nouvelle-Calédonie, de[...]
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Écrit par
- Edmond JOUVE : professeur à la faculté de droit de l'université de Paris-V-René-Descartes, membre de l'Académie des sciences d'outre-mer
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