RÉFLEXIONS SUR L'IMITATION DES ŒUVRES GRECQUES EN PEINTURE ET EN SCULPTURE, Johann Joachim Winckelmann Fiche de lecture
C'est en juin 1755 que Johann Joachim Winckelmann (1717-1768) fait paraître les Réflexions sur l'imitation des œuvres grecques en peinture et en sculpture, son premier livre. Initialement publié en une cinquantaine d'exemplaires, ce court essai attire aussitôt l'attention. Dès le printemps 1756, Georg Conrad Walther, un important éditeur de Dresde, procède à une réédition augmentée. L'ouvrage ne tarde pas à être considéré comme une pièce maîtresse de la réflexion sur l'art non seulement en Allemagne, où il marque le début du néo-classicisme, mais aussi en Europe, où il jouit d'un écho considérable. Entre 1755 et 1786 ne paraissent pas moins de quatre traductions françaises.
Un essai fondateur
À ce succès, de multiples causes. Parmi les plus superficielles, on pourra tout d'abord citer un effet réussi de stratégie éditoriale. Dès la seconde édition des Réflexions en 1756, Winckelmann ajoute au texte initial, qui prône l'imitation des Grecs, un plaidoyer anonyme en faveur des Modernes, dont l'auteur n'est autre en réalité que Winckelmann lui-même. Le procédé permet de piquer la curiosité du lecteur. Mais la fortune de l'essai tient surtout au message qu'il transmet : il faut, en art, imiter la Grèce, seule civilisation qui ait atteint la beauté absolue. Selon une tradition critique solidement établie, Winckelmann introduit par là un double changement. Tout d'abord, il impose à l'Allemagne un paradigme nouveau, l'art grec, inaugurant une tradition qui, de Goethe à Heidegger en passant par Nietzsche, n'a cessé de hanter la culture germanique. Ensuite, en centrant son essai sur la peinture et la sculpture, il déplace vers les arts plastiques une discussion esthétique qui, en Europe, avait jusqu'alors essentiellement porté sur la littérature, comme l'avait par exemple montré la « querelle d'Homère » dans la France du début du xviiie siècle.
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Écrit par
- Elisabeth DÉCULTOT : chargée de recherche au C.N.R.S.
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