RÉFORME DES RETRAITES
Les transformations des systèmes de retraite
La transformation supposée « nécessaire » des systèmes de retraite est devenue un des leitmotive des politiques publiques dès le début des années 1990, et plus encore après la publication, en 1994, du rapport de la Banque mondialeAverting the Old Age Crisis. On parle couramment à propos de ces transformations de « réformes ». Ce terme est contesté par de nombreux auteurs car les conséquences des transformations apportées aux systèmes de retraite sont, comme on le verra, une baisse du niveau des pensions et, plus généralement, une détérioration des droits à retraite, ce qui n'apparaît pas nécessairement comme un progrès, contrairement à ce que le terme réforme suppose. C'est donc surtout par commodité de langage qu'on utilisera ce terme dans la suite de cet exposé, sans y attacher de connotation positive ou négative.
Typologie des réformes
Les spécialistes des retraites ont coutume de distinguer, d'une part, les réformes structurelles qui se traduisent par une modification de l'architecture générale du système de retraite et, d'autre part, les réformes paramétriques qui visent, comme leur nom l'indique, à changer un ou plusieurs des paramètres de calcul des pensions sans modifier la logique d'attribution des droits. Avec le processus de réformes dans lequel sont entrés la plupart des pays, cette distinction entre réformes structurelles et réformes paramétriques tend cependant à s'estomper (cf. infra).
Parmi les États ayant effectué des réformes structurelles, les exemples de la Suède et de l'Italie sont le plus souvent cités. Dans ces pays, les transformations apportées au système de retraite visent à remplacer un système à prestation définie, c'est-à-dire où le montant de la pension est l'élément central de la formule de calcul, par un système à cotisation définie. Dans ce nouveau système, les pensions futures dépendront des droits accumulés par les salariés dans des comptes dits « notionnels ». Ces droits sont proportionnels aux cotisations versées et les comptes sont qualifiés de notionnels car il n'y a pas – ou très peu – d'accumulation financière, le système restant financé en répartition, c'est-à-dire que les cotisations versées continuent de financer les pensions des retraités. Le montant de la pension dépend à la fois de l’âge de départ à la retraite et de l'espérance de vie de la génération concernée au moment de la liquidation de la retraite ; il n'est donc pas connu à l'avance.
Ces réformes structurelles ne dispensent pas de définir les paramètres du nouveau système : taux de cotisation, taux de revalorisation des cotisations versées, âge de la retraite, indexation des pensions versées, notamment. Il n'y a donc pas nécessairement d'équilibre financier du régime – sauf lorsqu’il est explicitement prévu comme dans le cas suédois, où le taux de cotisation est fixe avec un ajustement automatique par le niveau des pensions pour atteindre l'équilibre financier du régime. Avec la crise financière mondiale de 2007-2008, le niveau des ressources du système suédois a fortement baissé, ce qui aurait dû entraîner un fort ajustement à la baisse du niveau des pensions. Cette perspective a suscité un débat, et le gouvernement a finalement décidé certains aménagements exceptionnels à ce dispositif automatique afin de ne pas trop pénaliser les retraités.
Le Conseil d’orientation des retraites (COR) a publié en 2010 un rapport examinant les conditions de mise en œuvre d’un système de comptes notionnels en France. Mais le gouvernement a jugé prématuré d’engager un débat, voire une réforme, sur cette question alors qu’il projetait déjà de reculer l’âge minimum légal de départ à la retraite. C’est donc un projet de cette nature qui a été adopté par le[...]
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Écrit par
- Pierre CONCIALDI : chercheur à l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES)
Classification
Médias