- 1. La fin sans gloire de la IIIe République
- 2. L'instauration d'un nouveau régime
- 3. La « Révolution nationale » : une révolution culturelle
- 4. La répression, caractéristique inhérente à la « Révolution nationale »
- 5. La coupure de novembre 1942 et les pièges de la collaboration d'État
- 6. Les soutiens du régime et les ambivalences de l'opinion publique
- 7. La fin pitoyable d'un régime policier
- 8. Les mémoires du régime de Vichy
- 9. Bibliographie
VICHY RÉGIME DE
Les soutiens du régime et les ambivalences de l'opinion publique
Toutes les droites se retrouvent dans les allées du pouvoir
Dès l'origine, le régime reçut un soutien sans équivoque de toutes les droites. Il est vrai cependant que tous les hommes de droite ne se retrouvèrent pas à Vichy, pas plus que, symétriquement, la Résistance ne saurait se réduire à la gauche. Reste que les personnalités militant jusqu'alors à gauche et qui ont pu être instrumentalisées par Vichy sont peu nombreuses (René Belin, ex-secrétaire du bureau confédéral de la C.G.T., devenu ministre du Travail, en étant l'exemple le plus connu). Alors que les droites arrivent en force et qu'aucune d'entre elles ne manque à l'appel ; la participation la plus voyante, et la plus massive dans un premier temps, est celle de la droite réactionnaire, notamment des militants ou des sympathisants de l'Action française, qui tiennent, selon le mot de Maurras, pour une « divine surprise » l'avènement d'un Pétain efficace. Mais on rencontre également, ce qui est beaucoup plus étonnant, des membres de la droite libérale (Joseph Barthélemy, qui sera garde des Sceaux), le plus souvent, il est vrai, des notables élitistes se réclamant de l'orléanisme. L'arrivée la plus remarquée fut celle de la droite technocratique (ainsi Pierre Pucheu), hauts fonctionnaires et cadres venus du privé, épris d'ordre et de rationalité modernisatrice, se sentant à l'aise dans ce régime autoritaire, débarrassés des pressions et du contrôle des élus locaux et de la classe parlementaire. Notons que, dès le départ, l'ultra droite factieuse était également représentée.
Cette diversité des droites ne doit pas occulter le fait que les valeurs défendues par Vichy comme les pratiques mises en œuvre portent avant tout la marque de ce qu'on peut nommer la droite extrême, conservateurs et libéraux brouillés avec la République, au moins depuis le Front populaire ; ceux-ci acceptent volontiers de servir un régime autoritaire, qui correspond précisément à ce qu'avait appelé de ses vœux l'extrême droite ligueuse.
Bon nombre de notables, y compris dans les milieux de gauche munichois, ont soutenu le régime jusqu'à la fin de 1943, de même que les patrons, petits et grands. Mais c'est du côté de l'Église catholique que le soutien apparaît le plus voyant (les églises réformées, quant à elles, ralliées au régime dans les premiers mois, entrèrent en dissidence morale après les rafles des Juifs de l'été 1942). L'épiscopat, à quelques très rares exceptions près, s'était senti immédiatement à son aise dans le nouveau régime. Un certain nombre de thèmes du catholicisme intransigeant et du catholicisme social avaient suffisamment modelé l'idéologie de la « Révolution nationale » pour que le primat des Gaules, le cardinal Gerlier, puisse faire sienne la devise de Vichy : « Travail, famille, patrie, ces trois mots sont les nôtres. » Sans doute, l'Église n'obtint pas tout ce qu'elle désirait (l'aide financière accordée par l'État aux écoles privées – contrairement aux canons de la laïcité – fut qualifiée d'exceptionnelle), mais elle bénéficia d'un statut privilégié : elle put notamment maintenir et même développer ses propres mouvements de jeunesse, obtint que les membres des congrégations religieuses puissent à nouveau enseigner (alors que les écoles normales d'instituteurs, tenues pour les foyers d'un laïcisme militant, étaient, elles, fermées). Le régime de Vichy apparut comme clérical : au respect que Philippe Pétain et la plupart des dignitaires de Vichy témoignaient à l'Église, répondait une présence active de celle-ci, toujours très en vue lors des visites du Maréchal dans telle ou telle ville, et le plus souvent partie prenante des autres manifestations officielles. Et surtout, les responsables de l'Église de France s'employèrent à combattre[...]
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Écrit par
- Jean-Pierre AZÉMA : professeur des Universités à l'Institut d'études politiques de Paris
Classification
Médias
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