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RELATIVITÉ Relativité générale

Relativité générale, théorie quantique et unification

Nous n'avons jusqu'ici examiné que la relativité générale classique, qui est pertinente pour décrire la gravitation à l'échelle macroscopique, mais insuffisante pour étudier l'interaction gravitationnelle à l'échelle microscopique, où entre en jeu le caractère quantique des particules élémentaires. Nous avons déjà noté, à propos de la radiation thermique des trous noirs de Hawking, qu'un champ gravitationnel classique peut influencer les propriétés quantiques de la matière ; nous allons maintenant considérer le problème de la quantification du champ gravitationnel lui-même. Il est d'abord clair qu'une telle quantification – et donc, en relativité générale, la quantification de la géométrie – est nécessaire puisque la source de la gravitation est le tenseur d'énergie-impulsion de la matière, lequel a, a priori, un caractère quantique, et ne peut qu'approximativement être remplacé par une valeur moyenne quasi classique. De plus, le programme d'unification de toutes les interactions conduit nécessairement à quantifier aussi la gravitation. Cependant, la quantification de la relativité générale soulève de nombreuses difficultés qui ont essentiellement deux origines : en premier lieu, on ne sait quantifier des systèmes non linéaires que de façon perturbative ; en second lieu, la gravitation fait intervenir une constante de couplage dimensionnée. En théorie quantique, on représente la gravitation par le champ ϕμν = κ—1hμν, et l'on développe la métrique en puissances de κ au voisinage de sa valeur minkowskienne : gμν = ημν + κϕμν. Or, comme l'avait remarqué Planck, immédiatement après la découverte du quantum d'action (constante de Planck = 2 π), la quantité l0 = κ '̅(ℏc/8 π) a la dimension d'une longueur (l0 ∼ 1,6 × 1033 cm, correspondant à une énergie E0 = ℏc/l0 ∼ 1,2 × 1028 eV). Mais une théorie de champ quantique faisant intervenir une constante de couplage ayant la dimension d'une longueur n'est pas renormalisable, ce qui veut dire que le calcul des effets quantiques non linéaires fait apparaître des quantités infinies qui enlèvent tout caractère prédictif à cette théorie au-delà de l'ordre linéaire (lequel reste une théorie bien définie de particules quantiques libres : « gravitons » de spin 2 et de masse nulle dans le cas gravitationnel). En outre, l'invariance de la relativité générale par rapport à toutes les transformations de coordonnées (qui est analogue à l'invariance de jauge des théories de jauge) implique la présence de contraintes compliquées entre les variables de champ. Les travaux de Paul Dirac et de Richard Arnowitt, Stanley Deser et Charles W. Misner ont cependant permis de construire une formulation hamiltonienne de la relativité générale classique, mais la quantification de cette dernière est loin d'être évidente. D'autres tentatives de quantification ont été faites (par exemple les formulations « covariantes de Lorentz », étudiées en particulier par Bryce S. DeWitt), mais elles se sont toutes heurtées à de graves difficultés. En somme, la quantification directe de la théorie d'Einstein pose problème. Peut-être faut-il alors considérer que la relativité générale n'est pas une théorie fondamentale, mais seulement une théorie effective qui découle, comme approximation macroscopique, d'une théorie unifiée sous-jacente. Cette ambitieuse vision unificatrice est devenue dominante depuis le début des années soixante-dix, après le succès de l'unification des forces non gravitationnelles, sous l'influence conjuguée de nouvelles idées (supersymétrie, cordes) et de l'idée plus ancienne (due à Theodor Kaluza et Oskar Klein) que l'espace-temps a peut-être plus de quatre dimensions.[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche au C.N.R.S., professeur à l'Institut des hautes études scientifiques, Bures-sur-Yvette, membre correspondant de l'Académie des sciences
  • : docteur en sciences, Harvard, docteur honoris causa, université de Stockholm, Fellow American Physical Society

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