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RELIGION (notions de base)

Deux hypothèses sont en concurrence à propos de l’étymologie du mot « religion ». Pour certains, comme Cicéron (106-43 av. J.-C.), il viendrait du latin religere, qui signifie « relire attentivement », « revoir avec soin ». Pour d’autres, le mot trouverait son origine dans un autre verbe latin, religare, signifiant « relier ». La première hypothèse met l’accent sur le scrupule, le soin méticuleux que l’adepte d’une religion met dans sa pratique, dans les rites auxquels il participe. La seconde valorise plutôt la fonction de la religion.

S’il est vrai que la religion « relie », que relie-t-elle ? Trois grandes réponses sont envisageables :

– elle relie l’homme aux dieux ou à Dieu, elle met en relation le monde terrestre des hommes et le monde céleste des divinités ;

– elle relie les hommes entre eux, constituant ainsi un lien social à nul autre pareil ;

– ou, enfin, elle relie l’homme à la nature, à l’Univers, développant en lui un sentiment d’appartenance à une dimension qui l’englobe et le dépasse.

Avant d’interroger ces différentes hypothèses, il faut mettre en évidence les paradoxes philosophiques de la notion de religion.

Un double paradoxe

Un premier paradoxe provient d’une caractéristique très particulière de la notion même de religion, qui n’apparaît dans le champ philosophique que lorsqu’elle commence à s’effacer du champ culturel. En effet, pendant une période historique considérable, tout était religieux dans les sociétés humaines, si bien qu’aucun recul ne pouvait permettre à l’esprit de penser la religion en tant que telle. La vie du groupe était entièrement régie par un système de croyances qui organisait les rapports des individus les uns avec les autres, la répartition des tâches, les rites auxquels chacun participait activement, ainsi que le calendrier de l’année. Il a fallu que la religion perde de son poids, qu’elle réduise son emprise, devenant seulement l’une des dimensions de la société parmi bien d‘autres, pour que quelque chose comme une philosophie de la religion voie le jour. Si de nombreux penseurs ont consacré de beaux développements à la croyance, il faut sans doute attendre G. W. F. Hegel (1770-1831) pour que la religion soit pensée philosophiquement dans sa globalité.

Second paradoxe : la religion relève pour l’essentiel d’une conviction subjective, d’une expérience intime très difficilement communicable. Elle est inséparable de ce que l’on dénomme la « foi ». Si bien que la philosophie, dont le seul outil est la raison, peut se voir reprocher son incapacité à penser sérieusement le phénomène religieux. Dans cette optique, l’homme qui vit profondément sa religion serait incapable de penser le sentiment qui l’anime, tandis que celui qui est extérieur à la religion serait démuni pour penser ce dont il n’a pas l’expérience.

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Écrit par

  • : professeur agrégé de l'Université, docteur d'État ès lettres, professeur en classes préparatoires

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