REMARQUES GÉNÉRALES SUR LES TEMPÉRATURES DU GLOBE TERRRESTRE ET DES ESPACES PLANÉTAIRES (M. Fourier)
Le bilan énergétique de la Terre dominé par l’absorption du rayonnement solaire et l’effet de serre
À cette l’époque, une hypothèse sur la formation des planètes, due à Buffon (1707-1788), est qu’elles sont issues d’une collision entre une comète et le Soleil, puis se sont progressivement refroidies. Ce refroidissement se fait par la surface, le centre des planètes restant toujours très chaud. Cette hypothèse est alors confirmée par l’observation, dans les mines, d’une augmentation de la température avec la profondeur. Dans quelle proportion cette chaleur venue du centre de la Terre réchauffe-t-elle la surface ? Elle est très faible, estime Joseph Fourier grâce à ses travaux sur la conduction de la chaleur dans les solides.
Si ces échanges de chaleur avec l’intérieur de la Terre ont un effet négligeable sur la température à la surface de la Terre, Joseph Fourier en déduit que cette température dépend principalement du rayonnement solaire et du rayonnement infrarouge. En faisant l’analogie avec une expérience réalisée par Horace Bénédict de Saussure (1740-1799) avec une boîte couverte de plusieurs vitres, Fourier postule alors que, comme les vitres dans cette expérience, l’atmosphère joue un rôle crucial sur la température de la Terre en laissant passer pratiquement tout le rayonnement solaire et – c’est là une idée complètement nouvelle – en absorbant une partie du rayonnement infrarouge émis par la surface, limitant de fait le refroidissement de la Terre : « C’est ainsi que la température est augmentée par l’interposition de l’atmosphère, parce que la chaleur [rayonnement solaire] trouve moins d’obstacle pour pénétrer l’air, étant à l’état de lumière, qu’elle n’en trouve pour repasser dans l’air lorsqu’elle est convertie en chaleur obscure [aujourd’hui appelée rayonnement infrarouge]. » C’est le fondement de ce qu’on appellera effet de serre, Joseph Fourier n’ayant pas utilisé cette expression. Le rayonnement infrarouge avait déjà été découvert en 1800 par l’astronome britannique d’origine allemande William Herschel (1738-1822) mais pas les lois en régissant son émission et son absorption. Ce n’est qu’au milieu du xixe siècle que l’Américaine Eunice Foote (1819-1888) puis l’Irlandais John Tyndall (1820-1893) mesureront l’absorption du rayonnement infrarouge par l’atmosphère et établiront que cette absorption est principalement due à la vapeur d’eau (H2O) et au dioxyde de carbone (CO2). Les lois régissant l’émission et l’absorption du rayonnement seront progressivement établies au cours du xixe siècle et au début du xxe, avec notamment la naissance de la physique quantique. De nombreux progrès scientifiques et techniques seront encore nécessaires pour que, à partir des années 1960, l’effet de serre soit estimé à partir de mesures par satellite, calculé par des modèles radiatifs, et que la contribution relative de H2O et CO2 soit quantifiée.
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Écrit par
- Jean-Louis DUFRESNE : directeur de recherche au CNRS
Classification
Média