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REMUE

Passé dans le vocabulaire de la géographie alpine, le terme savoyard local « remue » désigne les déplacements, au long de l'année, de tout ou partie des habitants et du bétail d'une collectivité montagnarde, entre les différents niveaux de la montagne utilisant au maximum l'étagement des ressources. Les remues ne doivent pas être confondues avec la transhumance, ou l'inalpage, qui n'en sont que des éléments. Elles intéressent le genre de vie agropastoral de l'ancienne économie traditionnelle. Peu pratiquées dans les Alpes orientales et les Carpates, les remues avaient leur domaine d'élection dans les Alpes occidentales, sur les versants des grandes vallées internes (Valais, Maurienne, Tarentaise), à cause du caractère complémentaire des climats et des végétations. Les modalités du déplacement varient, selon la position de l'habitat principal, entouré de jardins, de champs et de prairies artificielles ; elles combinent migrations ascendantes et descendantes avec des étapes dans le fond de la grande vallée (vergers et vignes), à la base des versants dans la zone supérieure de la pelouse alpine, et souvent plusieurs haltes intermédiaires, sur le chemin des chalets d'inalpage, dans les « montagnettes » (mayens du Valais, Voralpen des Alémaniques).

Alors que la migration du troupeau se fait à des dates traditionnelles, les déplacements de main-d'œuvre pour les cultures (vendanges, labours, fauchaisons, moissons, récolte des pommes de terre) sont dictés par le calendrier agricole. Dans les cas les plus complexes, le montagnard était un nomade qui « remuait » perpétuellement, d'où un énorme gaspillage de temps en parcours et en transports, et la charge de multiples bâtiments à entretenir. Seule la saison d'hiver voyait la famille regroupée à la demeure principale. L'âge d'or des remues correspond à l'époque de vie autarcique qui a régné dans les Alpes avant la Première Guerre mondiale. Les transformations de l'économie contemporaine par l'exode rural, l'industrialisation, le tourisme, le déclin de l'agriculture de montagne leur ont été fatales. Partout où elles subsistent encore, elles se sont simplifiées, atrophiées. Dans bien des secteurs, elles ont complètement disparu.

— Paul GUICHONNET

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