RÉMY GILBERT RENAULT dit LE COLONEL (1904-1984)
Né à Vannes (Morbihan) le 6 août 1904, Gilbert Renault, attaché à la Banque de France en 1924, directeur d'un organisme de financement des films français en 1937, a vu sa vie transformée par la guerre où il est devenu Rémy, celui dont sir Dansey, l'un des chefs de l'Intelligence Service britannique, devait dire qu'il était « le plus extraordinaire agent secret » qu'il eût jamais rencontré. « Plein d'allant et de dynamisme, [... avec] une sensibilité aux nuances parfois mystiques, [... avec une parole] nette, précise, mesurée », tel apparut Rémy à son chef, le colonel Passy, fondateur des services secrets de la France libre, qui écrivit : il fut le « pilier essentiel de tout ce que je pus créer ». Rallié au général de Gaulle, le 28 juin 1940, Gilbert Renault effectua son premier retour en France, via le Portugal et l'Espagne, en novembre 1940. Chargé de surveiller les mouvements allemands sur la côte atlantique, il organisa des liaisons solides avec l'aide d'un de ses amis, consul de France à Madrid. « Un par un, pierre vivante par pierre vivante », il sut recruter des agents de grande qualité qui fournirent les plans des bases sous-marines allemandes, un échantillon de nouveau métal, des modèles de papiers d'identité, les éléments qui permirent le raid de Bruneval et la destruction de radars allemands dès février 1942. Sous les pseudonymes de Jean-Luc, de Raymond puis, à partir de septembre 1941, de Rémy, Gilbert Renault fit de son réseau — la Confrérie Notre-Dame (C.N.-D.) — une « firme à succursales multiples » dont la maison mère était la France libre, Carlton Gardens, Londres. Et, pour le Bureau central de renseignements et d'action (B.C.R.A.) du colonel Passy, l'activité de la C.N.-D. — trente messages radio par jour dès avril 1941, soixante-dix courriers en trois ans — fut un moyen très précieux pour faire reconnaître les agents de la France libre par les autorités britanniques. Dès avril 1942, seize radio-télégraphistes avaient payé de leur vie les résultats de la C.N.-D. Puis des trahisons compromirent l'efficacité du réseau : dès juin 1942, l'arrestation d'un agent de liaison aboutit à soixante arrestations et cinquante-deux déportations ; en novembre 1943, la défection d'un radio fut suivie de quatre-vingt-onze arrestations. La centralisation de la C.N.-D. était évidemment dangereuse, malgré les neuf agences régionales et la séparation des transmissions ; la qualité des agents du colonel Rémy leur permit de poursuivre la lutte, en 1944, dans C.N.-D. Castille.
Si la C.N.-D. fournit d'abord des renseignements militaires et si son chef eut à coordonner la résistance militaire dans la zone nord de la France, Rémy fut aussi chargé de contacts avec les mouvements politiques de la Résistance. Et même s'il condamnait la tactique communiste des attentats individuels inaugurée en août 1941 — tout en soulignant que les fusillades d'otages soulevaient de justes colères « dans le cœur des Français bien nés » —, c'est lui qui conduisit, au printemps de 1942, les premières discussions entre la France combattante et les Francs-tireurs et partisans animés par Charles Tillon et Marcel Prenant. C'est aussi le colonel Rémy qui eut le premier contact, en novembre 1942, avec Fernand Grenier et qui l'accompagna, en janvier 1943, lorqu'il vint à Londres y représenter officiellement le Parti communiste français. Gilbert Renault, pétri de bravoure et de traditions, ne fut pas un agent secret traditionnel et n'hésita pas, pour fêter l'an neuf en janvier 1943, à convoyer de Paris à Londres une immense azalée pour Mme de Gaulle. Après la guerre, en 1950, il s'éloigna du général de Gaulle et du Rassemblement du peuple français après avoir publiquement signifié que la France occupée[...]
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Écrit par
- Charles-Louis FOULON : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)
Classification
Autres références
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PASSY ANDRÉ DEWAVRIN, dit LE COLONEL (1911-1999)
- Écrit par Charles-Louis FOULON
- 730 mots
Compagnon de la Libération, il fut l'unique chef des services secrets de la France libre.
Né le 9 juin 1911 à Paris, dans une famille d'industriels, André Dewavrin, licencié en droit et polytechnicien, est professeur adjoint de fortification à Saint-Cyr en 1938-1939. Rapatrié de ...