PLEVEN RENÉ (1901-1993)
Breton républicain et Français libre, ces qualificatifs symbolisent René Pleven, inamovible président du conseil général des Côtes-du-Nord de 1948 à 1976, député et ministre sous deux Républiques et deux fois président du Conseil des ministres de 1950 à 1952, au moment de l'ébauche de la Communauté européenne de défense (C.E.D.) et du lancement de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (C.E.C.A.). Né à Rennes le 15 avril 1901, ce fils d'un colonel futur directeur des études à Saint-Cyr est élève des lycées de Rennes et de Laval ; docteur en droit et diplômé de l'École libre des sciences politiques de Paris, il fait carrière dans les affaires. Il croise dès 1925 l'européen Jean Monnet et, de 1929 à 1939, il est directeur général pour l'Europe de l'Automatic Telephone Company.
Rallié au général de Gaulle dès le 19 juin 1940, René Pleven contribue au ralliement de l'Afrique-Équatoriale française, dont il devient secrétaire général lorsque s'y constitue le Conseil de défense de l'empire. Le 24 septembre 1941, il est l'un des neuf membres du Comité national français à Londres. Commissaire à l'Économie, aux Finances et aux Colonies, il coordonne l'ensemble des affaires civiles. En tant que commissaire aux Colonies, il préside en février 1944 la conférence de Brazzaville, qui affirme le principe “l'Afrique aux Africains”, mais esquisse l'évolution de l'empire vers une France de 110 millions d'habitants dont les indigènes des “provinces lointaines” seront “élevés peu à peu jusqu'au niveau où ils seront capables de participer chez eux à la gestion de leurs propres affaires”.
Compagnon de la Libération, le ministre des Colonies passe aux Finances en novembre 1944 ; il subit les critiques du ministre de l'Économie nationale, au sujet d'une politique d'emprunts et de relèvements de salaires que Pierre Mendès France juge inflationniste. Mais René Pleven répond que “la trésorerie ne peut supporter les dépenses de guerre et de reconstruction et combattre l'inflation que par un appel constant aux souscripteurs de valeurs du Trésor”. Il plaide donc pour l'unanimité nationale et pour la nécessité de ne pas inquiéter les déposants des caisses d'épargne et les détenteurs de bons du Trésor. Le général de Gaulle lui donne raison en récusant la manière forte et en rejetant l'idée d'un échange des billets de banque, car il juge le pays “malade et blessé” et tient pour préférable de ne pas “bouleverser sa subsistance et son activité”.
Cette politique de modération va marquer les choix ministériels de René Pleven qui occupe, après 1949, une place stratégique dans le fonctionnement de la Troisième Force et la marginalisation relative du P.C. et du R.P.F. (Rassemblement du peuple français). Tour à tour, celui qui, avec François Mitterrand, anime l'U.D.S.R. (Union démocratique et socialiste de la Résistance) obtient les portefeuilles de ministre de l'Économie nationale et des Finances (1945), de la Défense nationale (oct. 1949-juin 1950 et mars 1952-juin 1954), des Affaires étrangère (14-31 mai 1958).
De juillet 1950 à février 1951 et d'août 1951 à janvier 1952, René Pleven est président du Conseil des ministres. Avant la chute de son second gouvernement, à propos d'économies sur les budgets de la Sécurité sociale et de la S.N.C.F., il a obtenu en décembre la ratification du traité instituant la C.E.C.A., premier élément de ces réalisations concrètes par lesquelles se préparait alors le traité de Rome de 1957 et, au-delà, l'actuelle Communauté européenne. C'est à cause de l'Europe et de son rôle dans la préparation de la C.E.D. qu'il reste éloigné des gouvernements sous la présidence de Charles de Gaulle, de 1959 à 1969. Nommé,[...]
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Écrit par
- Charles-Louis FOULON : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)
Classification
Média