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REPRÉSENTATION POLITIQUE

Quelle crise de la représentation politique ?

Le thème de « la crise de la représentation » démocratique s'est imposé depuis plusieurs décennies comme un lieu commun du discours politique contemporain, au point que l'on peut s'interroger sur la pertinence d'un tel diagnostic. Ni ébranlement, ni rupture, ni perturbation profonde n'ont touché jusqu'à présent cette formule de gouvernement qui tend au contraire à s'imposer à travers le monde comme la norme en matière de dévolution du pouvoir. Depuis maintenant plus de deux siècles, dans les sociétés occidentales, les mécanismes du gouvernement représentatif se caractérisent avant tout par leur capacité d'adaptation au changement et de résistance à la critique. Mieux, les symptômes le plus souvent évoqués de la « crise » – baisse tendancielle du taux de participation électorale, perte de confiance dans le personnel politique, perception d'une moindre efficacité de l'action politique, etc. – renvoient à des phénomènes de nature très différente et qu'il n'est pas forcément possible ni nécessaire de penser ensemble. Ils ne correspondent nullement à une remise en cause frontale des principes sur lesquels repose la démocratie représentative. La critique de la représentation n'en est pas moins vivace. Elle emprunte aujourd'hui, dans les démocraties occidentales, deux voies principales.

Elle renoue, en premier lieu, avec ce qui relève d'un questionnement permanent de la démocratie représentative : comment assurer la représentation fidèle du peuple dans sa diversité ? Dès la fin du xixe siècle, le mouvement socialiste mettait en avant la nécessité d'une représentation ouvrière authentique face au recrutement élitiste du personnel parlementaire. Aujourd'hui, c'est la question de la représentation différentielle des sexes ou des minorités ethniques et culturelles qui est posée.

En second lieu, cette critique de la représentation prend la forme d'une recherche de formules politiques et institutionnelles nouvelles visant à dépasser le cadre strict de la démocratie représentative. Des dispositifs (instances participatives de quartier, débat public, procédures de consultation et de concertation, budget participatif, conférences de citoyens, sondages délibératifs, etc.) visant à associer les citoyens ordinaires à la discussion des affaires publiques et à l'élaboration des choix collectifs s'inventent aujourd'hui dans les démocraties occidentales. Ces initiatives semblent faire écho à l'effort accompli par certains penseurs politiques contemporains pour repenser l'idéal démocratique, à l'aide notamment de concepts nouveaux tels ceux de « démocratie participative » ou de « démocratie délibérative » (Jürgen Habermas). Pour novatrices qu'elles soient parfois, de telles expériences n'en restent pas moins très en deçà d'un mouvement historique de balancier en faveur de formes renouvelées de la démocratie directe. Ces différents dispositifs sont au contraire presque toujours pensés comme des compléments, sinon des adjuvants, aux mécanismes traditionnels de la démocratie représentative et le pouvoir dévolu aux citoyens y est nul ou très indirect. Il semble que, pour longtemps encore, nos sociétés ne veuillent ou ne puissent pas se passer de la représentation.

— Loïc BLONDIAUX

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Écrit par

  • : professeur des universités à l'I.E.P. de Lille, C.E.R.A.P.S., Lille-II

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