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RESTAURATION (peinture et sculpture)

Histoire de la restauration au xixe siècle

Prise entre deux paradoxes, vandalisme et sauvegarde, la période révolutionnaire favorise l'émergence de personnalités comme celle d' Alexandre Lenoir. Garde du dépôt des Petits-Augustins, il récupère, recompose souvent arbitrairement et reconstitue des ensembles avec un souci de conservation au sein d'un même lieu, le musée des Monuments français.

Avec les conquêtes révolutionnaires et napoléoniennes, l'afflux d'œuvres venues de France, puis de toute l'Europe, bouleverse non seulement la connaissance des courants artistiques, mais conduit à porter un intérêt grandissant à la conservation de ces collections qui, transportées et ballottées sur des chariots, nécessitent bien souvent d'être restaurées à l'arrivée ! Le Muséum central des arts s'est d'ailleurs doté de commissions de restauration, principe réactivé dans la seconde moitié du xixe siècle par le conservateur Frédéric Villot. On lui reprocha ses choix sans concertation qui lui coûtèrent son poste.

Victoire de Samothrace - crédits : D.R.

Victoire de Samothrace

La restauration attend encore ses principes. C'est chose faite, par le prisme de l' architecture, avec les débats opposant l' architecte français Eugène Emmanuel Viollet-le-Duc et l'écrivain et critique d'art anglais, John Ruskin. Tous deux réagissent aux mêmes réalités –  comment conserver les témoignages du passé historique et national ? –, mais apportent des réponses divergentes. La formule célèbre du premier, « Restaurer un édifice, ce n'est pas l'entretenir, le réparer ou le refaire, c'est le rétablir dans un état complet qui peut n'avoir jamais existé à un moment donné », le conduit à restaurer les monuments dans un état supposé et théorique. Le second préfère laisser les monuments du passé dans leur état, craignant que l'intervention les dénature et les trahisse.

Une génération plus tard, dans son ouvrage Questioni pratiche di Belle Arti (1893) l'Italien Camillo Boito a habilement posé les bases d'une réflexion sur la distinction nécessaire entre les parties anciennes et les parties modernes de laquelle résultent des choix ouvrant ainsi la voie à la théorie des valeurs, chères à l' Autrichien Alois Riegl. Ce dernier, conservateur au musée des Arts décoratifs de Vienne, publie Culte moderne des monuments (1903). Il y formule une théorie qui pose les bases de toute réflexion préliminaire au projet de restauration : les monuments et les œuvres d'art n'ont pas de valeur en eux-mêmes. Ils sont le support de ce qui leur a été conféré suivant un système de valeurs – historique, d'ancienneté, d'usage, artistique – qui peuvent coexister mais aussi bien entrer en conflit. Ainsi, à l'aube du xxe siècle, les bases d'une réflexion théorique sur la restauration sont posées, prêtes à passer de l'architecture aux autres domaines de la création artistique. Le penchant pour les peintures très jaunes recouvertes d'une patine dite « jus musées » ou pour les sculptures reconstituées est pratiquée.

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Écrit par

  • : conservatrice générale du patrimoine, chef du département restauration du Centre de recherche et de restauration des musées de France

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Médias

Victoire de Samothrace - crédits : D.R.

Victoire de Samothrace

<it>Vénus et l'Amour</it> de Luca Penni, en cours de nettoyage - crédits : P.-Y. Duval/ C2RMF

Vénus et l'Amour de Luca Penni, en cours de nettoyage

Sculpture en cours de nettoyage - crédits : A. Chauvet/ C2RMF

Sculpture en cours de nettoyage