RETRAITE
Leçons des expériences nationales
Les conditions de la répartition
Pour fonctionner durablement en répartition, un régime de retraite doit couvrir une population large relativement stable. Seuls des régimes obligatoires concernant des groupes importants de travailleurs, comme l'ensemble des fonctionnaires ou tous les cadres du secteur privé, répondent à cette condition. Un tel régime peut asseoir son financement sur les seules cotisations collectées, sans accumuler de réserves.
Dans les pays industrialisés, les grands régimes de retraite obligatoires ont connu une phase de montée en charge pendant les premières décennies de leur fonctionnement, période pendant laquelle la masse des pensions a augmenté de façon continue par rapport à la masse salariale. Les taux de cotisations se sont élevés progressivement, de manière à équilibrer les régimes, ces augmentations concernant l'ensemble des salariés et employeurs participants. Par la suite, le rapport entre les pensions et la masse salariale soumise à cotisations fluctue, mais de façon moins importante et moins abrupte qu'à l'échelle d'une branche ou d'une entreprise. Si l' emploi diminue dans certaines entreprises ou branches, il peut augmenter dans d'autres, se soldant par une certaine stabilité de l'emploi global et donc de la masse salariale qui constitue l'assiette des cotisations. Si un régime affilie des salariés à travers tout le secteur privé – dans toutes les entreprises, régions et branches –, les emplois qui disparaissent dans un endroit seront compensés par des créations d'emplois ailleurs. Le régime peut fonctionner sans déséquilibre marqué, malgré les fluctuations locales de l'emploi. Autrement dit, la répartition est peu vulnérable à la conjoncture, grâce à la solidarité qu'elle met en place entre entreprises, secteurs d'activité et régions.
Cela n'empêche pas qu'un régime à large couverture puisse accumuler des réserves et utiliser le rendement obtenu sur les placements effectués avec ces réserves pour compléter le financement par des cotisations. L'Arrco et l'A.G.I.R.C. possèdent des réserves mais celles-ci sont très limitées par rapport aux engagements de ces régimes : elles sont équivalentes à environ une année de prestations. L'État français a instauré un fonds de réserves pour le régime général, mais ce fonds n'a pas reçu les versements prévus lors de sa mise en place. En dehors de la France, certains régimes publics détiennent des réserves, encore que celles-ci peuvent prendre la forme d'une créance sur l'État, auquel cas le remboursement de cette créance entraînera une dépense budgétaire pour financer une partie des pensions à venir. Une telle dépense peut être exposée à une contestation politique. Ainsi, aux États-Unis, les réserves du régime de base, placées en bons du Trésor, sont-elles menacées de préemption par certains républicains.
La nécessité de réserves pour les régimes à couverture restreinte
Contrairement aux grands régimes obligatoires, les régimes professionnels couvrant des groupes restreints, tels les salariés d'une seule entreprise, sont obligés d'accumuler des réserves placées en dehors de l'entreprise elle-même. Sinon, une faillite de l'entreprise entraînerait la cessation de paiement des pensions en cours et la perte de toute pension future pour les salariés non encore retraités.
Dans le cadre d'un régime à cotisations définies, l'employeur s'engage à cotiser pour le compte des salariés à une caisse de retraite, mais il ne s'engage pas sur le montant des pensions versées. Les pensions sont fonction de la valeur des réserves accumulées au cours de la carrière des salariés, calculées de manière à ce que les réserves suffisent à financer l'ensemble des pensions. Dans un régime à cotisations définies,[...]
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Écrit par
- Lucy apRoberts : chercheur associé au laboratoire Institutions et dynamiques historiques de l'économie (CNRS-Université de Paris X Nanterre)
- Anne-Marie GUILLEMARD : professeur à l'université de Paris-V, membre de l'Institut universitaire de France
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