MERS RETRAITS ET AVANCÉES DES
Les fluctuations du volume des glaciers continentaux
Deux grandes calottes glaciaires recouvrent aujourd'hui les continents polaires : celle de l'Antarctique (29 millions de kilomètres cubes) et celle du Groenland (1 million de kilomètres cubes). Le niveau de la mer remonterait d'environ 70 mètres si elles venaient à fondre. Il y a seulement 20 000 ans, en raison d'un climat particulièrement rigoureux sur les hautes latitudes de l'hémisphère Nord, les glaciers avaient envahi le Canada, la Scandinavie et le nord de l'Europe jusqu'à l'Oural. Leur volume atteignait 50 millions de kilomètres cubes. La croissance des glaciers était due à d'abondantes chutes de neige qui ne fondait pas pendant l'été (cf. paléoclimatologie). Ces précipitations étaient apportées par des nuages qui s'étaient chargés en vapeur d'eau au-dessus des océans. C'est pourquoi le niveau de la mer avait alors baissé d'environ 120 mètres, comme en témoigne l'existence de plages et de récifs coralliens fossiles que l'on retrouve à cette profondeur sur les flancs d'îles, comme la Barbade dans l'océan Atlantique, ou sur le rebord de tous les continents.
Seules les plus récentes des fluctuations du niveau de la mer peuvent être déduites directement de la datation de plages fossiles. Pour les périodes plus anciennes, les variations de niveau marin associées à celles des glaciers continentaux peuvent être reconstruites par l'étude isotopique des sédiments marins. En effet, les glaces sont constituées d'eau très pauvre en isotopes lourds (deutérium et oxygène 18). Le développement de calottes glaciaires à la surface des continents s'accompagne donc d'une augmentation de la teneur en isotopes lourds de l'eau restant dans l'océan. Or le rapport 18O/16O est enregistré dans la coquille calcaire de nombreux fossiles marins. L'analyse isotopique des coquilles de foraminifères fossiles présentes dans les sédiments marins a ainsi permis de reconnaître une succession de phases glaciaires au cours des derniers millions d'années, phases pendant lesquelles les glaciers continentaux avaient considérablement grossi, et de périodes interglaciaires, pendant lesquelles ceux-ci avaient fondu pour ne garder qu'un volume proche de celui observé actuellement. Ces études, couplées à celle des plages fossiles, ont montré que depuis 1 million d'années une grande poussée glaciaire accompagnée d'une baisse du niveau marin de 120 mètres se développe tous les 100 000 ans environ. Des oscillations de plus faible amplitude (de 40 à 60 mètres) apparaissent également avec des périodicités de 23 000 et 41 000 ans. Toutes ces périodicités sont celles de la théorie astronomique des paléoclimats de Milankovitch (cf. paléoclimatologie). Cependant, les glaciers sont arrivés beaucoup plus tôt : leur installation sur le Groenland date de — 6 Ma, tandis que la calotte glaciaire du continent Antarctique est bien antérieure. Elle connut une phase majeure d'expansion il y a environ 15 Ma, mais de grands glaciers relâchaient déjà des icebergs dans l'océan Austral il y a 36 Ma. Depuis environ 15 Ma, le climat de la Terre et le volume des glaciers continentaux ont présenté des fluctuations importantes en suivant le rythme de 41 000 ans, jusqu'à l'initiation des grandes glaciations du dernier million d'années. Le niveau de la mer les suivait et oscillait de quelques dizaines de mètres.
Ces glaciations du Quaternaire et de la fin du Tertiaire ne sont pas exceptionnelles. Au cours de son histoire géologique, la Terre en a connu beaucoup d'autres. Les premières sont apparues dès le Précambrien, c'est-à-dire antérieurs à 600 Ma. Toutes se sont traduites par des régressions marines reconnaissables dans le faciès des couches sédimentaires.[...]
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Écrit par
- Jean-Claude DUPLESSY : directeur de recherche au C.N.R.S., Centre des faibles radioactivités, Gif-sur-Yvette
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