AGRICOLE RÉVOLUTION
Aux origines de l'agriculture moderne
Origines capitalistes de la révolution agricole
Un pays a joué le rôle de « pilote » de la révolution agricole : l'Angleterre. Le commerce maritime et colonial y avait accumulé les capitaux et l'exemple de la Flandre, qui pratiquait depuis le xve siècle, à force de travail humain incessant, les cultures continues sans jachères, fut repris sur une grande échelle. Amorcée dès le xvie siècle, l'évolution de l'agriculture anglaise s'accentue au xviiie. Bientôt, à cause de l'anglomanie qui imprègne l'aristocratie française, et grâce à la curiosité d'esprit qui, en tous domaines, se manifeste au « siècle des Lumières », le mouvement de rénovation agricole gagne le continent. Les études théoriques et les recherches pratiques seront menées de front, les premières illustrées par l'école physiocratique française, et les secondes poursuivies par nombre de propriétaires anglais.
La révolution agricole revêt des aspects multiformes, car elle affecte tous les cadres sociaux, économiques ou techniques de l'agriculture traditionnelle ; mais elle se heurte à la résistance obstinée des anciennes pratiques, issues d'un empirisme séculaire. Gagnant lentement de proche en proche, par osmose, le système nouveau s'étaye sur les progrès de la connaissance agronomique et contribue, comme l'a montré Walt Whitman Rostow dans ses Étapes de la croissance économique, au démarrage des économies occidentales. L'effet fondamental de la révolution agricole fut d'accroître radicalement la productivité de la culture et de l'élevage, et, par là, de développer largement la production de denrées alimentaires et de matières premières d'origine agricole.
C'est à travers une imprégnation « capitaliste » que les transformations se font jour : pour les partisans de l'« agriculture nouvelle », il est nécessaire, afin d'accroître les rendements et de supprimer les jachères, d'engager dans l'agriculture de très gros capitaux ; cette attitude est véritablement révolutionnaire. Le marquis de Mirabeau affirme : « L'Argent est le plus indispensable fumier qu'on puisse répandre sur la terre. » En Angleterre plus qu'en France, la terre, qui apparaît comme un placement sûr et profitable à une époque où la croissance démographique est rapide, voit les capitaux disponibles affluer massivement. L'idée se fait jour que seule la grande propriété est favorable au progrès technique. Tandis qu'en Grande-Bretagne les enclosures se multiplient et donnent naissance à de nombreux grands domaines, dans les provinces françaises les plus ouvertes aux innovations les « réunions de fermes » se succèdent, aux dépens des petites exploitations, démunies de capitaux. Seules les grosses exploitations capitalistes, dégageant un important « produit net », sont capables, selon les théoriciens, de s'intégrer à la vie économique d'échanges.
C'est à une véritable reconstruction de l'agriculture que les novateurs convient leurs concitoyens. Elle est esquissée dans de nombreuses directions complémentaires, et tend, sur le plan technique, à instaurer entre production animale et production végétale un équilibre meilleur, parce que situé à un niveau plus élevé. En effet, pour obtenir un accroissement des rendements en céréales, il s'agit de développer l'élevage, ce qui doit permettre la suppression des jachères par le truchement de fumures plus abondantes. Pièces essentielles du programme : la création de prairies artificielles et le développement de la culture de prairies artificielles et de racines fourragères. Ces cultures seules peuvent briser le « cercle vicieux » de l'agriculture traditionnelle, pauvre en bestiaux parce que pauvre en terres, et pauvre en terres à cause de la jachère et du faible rendement[...]
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Écrit par
- Abel POITRINEAU : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Clermont-Ferrand
- Gabriel WACKERMANN : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
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