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BANHAM REYNER (1922-1988)

Peter Reyner Banham est l'historien de l'architecture le plus intimement lié aux interrogations de cette discipline dans l'après-guerre. Né à Norfolk en 1922, il travaille quelque temps dans l'industrie aéronautique tout en collaborant à la rubrique artistique de divers journaux de l'est de l'Angleterre. Il s'établit à Londres en 1949 pour entreprendre des études d'histoire de l'art au Courtauld Institute que dirige Anthony Blunt. Nikolaus Pevsner le pousse à reprendre l'étude de l'histoire de l'architecture là où la quittait son Pioneers of the Modern Movement, vers 1910, ce que fait Banham mais à contre-pied des thèses de son maître. Son travail de doctorat, Theory and Design in the First Machine Age en 1960, s'applique à mettre en évidence les limites du rationalisme des architectes modernes, leur manque de formation aux véritables questions techniques, leur formalisme classicisant qui, estime-t-il, derrière le masque d'une théorie à caractère logique, ne permit jamais au Style international de se libérer du poids de l'émotion et du sentiment artistique.

Toute sa vie, Banham se tient dans une complicité critique à l'égard des architectes modernistes et de ses amis eux-mêmes. Il devient le théoricien malgré lui – et la mauvaise conscience – de cette génération qu'on désigne comme celle des brutalistes. Critique (à The Architectural Review de 1952 à 1964, au New Statesman puis à New Society), professeur à la Bartlett School de l'University College (au sein de laquelle règne un esprit pluridisciplinaire, attaché à l'analyse des méthodes et des processus, et où est créée pour lui, en 1969, la première chaire d'histoire de l'architecture de Grande-Bretagne), Reyner Banham tient aussi avec sa femme Mary, le dimanche matin, une sorte de salon réunissant artistes et architectes liés à l'Independant Group et au mouvement pop dont, après l'exposition collective de 1956 This Is Tomorrow à la Whitechapel Art Gallery, il apparaît comme l'un des principaux porte-parole. Son ouvrage The New Brutalism paraît en 1966, alors que les protagonistes du mouvement (les Smithson, Gowan, Stirling) lui semblent porteurs de « beaucoup moins d'énergie, éthique ou esthétique, qu'à la fin des années 1950 » et constituent, écrit-il, « finalement une déception » alors qu'il en avait attendu « un fonctionnalisme sans complexe ».

Passionné par Marinetti et par le futurisme italien, il développe une sorte de morale de l'utilité, de l'anti-esthétisme et du progrès technique, s'opposant constamment aux rhétoriques architecturales. C'est la dimension sociale, politique et technique de cette histoire qui va retenir son attention : histoire de la lumière, de la climatisation, des appareils de contrôle de l'environnement et non plus des codes formels. Son ouvrage de 1969, Architecture of the Well-Tempered Environment, tente justement de construire cette histoire de la part maudite de l'architecture, à peine esquissée avant lui par S. Giedion : celle de la technologie interne et secrète, d'une invention systématiquement masquée par le débat stylistique et refoulée derrière la façade, celle de ce monde des « organes » mécaniques qu'il jugeait, dans un article à la gloire de L'A-maison, « trop modernes pour avoir déjà leur sagesse proverbiale dans le livre d'or des architectes » et menaçant, à terme, toute la culture factice d'une profession attachée à ses « faux monuments » par peur du vide, de la vastitude, du provisoire et, finalement, de la liberté.

L'optimisme de Banham est ébranlé par la crise des années 1970 : la critique écologique, la prise de conscience de la raréfaction possible des ressources et de l'énergie, la montée du postmodernisme et du nouveau[...]

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  • ARCHITECTURE CONTEMPORAINE - Construire aujourd'hui

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    Dans l'un de ses ouvrages les plus connus, The Architecture of the well-tempered environment, publié en 1969, l'historien britannique de l'architecture Reyner Banham avait montré comment l'architecture moderne s'était proposée, avec un succès variable, de repenser des programmes comme...