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DINDO RICHARD (1944- )

Richard Dindo est né en Suisse alémanique. Ses premiers travaux révèlent ses préoccupations centrales, qu'il ne cessera d'approfondir de film en film : l'art, dans ses motivations enfouies (Peintres naïfs en Suisse orientale, 1972 ; Charlotte, vie ou théâtre ? 1992) ; la politique, quand elle travaille la société loin de la scène officielle (Des Suisses dans la guerre d'Espagne, 1973 ; L'Exécution du traître à la patrie Ernest S., 1975). Observateur implacable de la réalité suisse, dont il exhume la mémoire clandestine, il estime qu'un seul détail peut mettre en cause tout un système. Il excelle dans le traitement des faits occultés parce que considérés comme des anecdotes ou des faits-divers. Dani, Michi, Renato et Max (1987) est une reconstitution typique de sa manière. La première partie raconte, par témoins interposés et au fil d'une démarche explicative, la mort mal élucidée de Dani et de Michi, tués au cours d'une poursuite nocturne, de façon apparemment accidentelle. Les deuxième et troisième parties racontent la mort de Renato, atteint par balles au volant d'une voiture volée ; et celle de Max, jeune anarchiste roué de coups alors d'une manifestation. Les trois récits sont traités selon des méthodes identiques : témoins qui déposent comme à la barre, reconstitutions selon les témoignages et les enquêtes de police, documents d'archives. Ils sont reliés par la participation commune des quatre jeunes gens à la vie éphémère d'une maison des jeunes, l'A.J.Z., créée à contrecœur par la ville de Zurich avant d'être interdite et détruite un jour à l'aube et de devenir le symbole d'une opposition entre la jeunesse et les institutions.

« Cinéaste de la mémoire », comme il se définit, Richard Dindo, avec rigueur et minutie, s'attache à faire revivre, dans des biographies fragmentées, des personnages disparus, connus ou inconnus. Che Guevara, journal de Bolivie (1994) suit pas à pas, sans complaisance pour la légende, le journal du célèbre guérillero. Un protocole sévère, renforcé par des prises de vues fixes et insistantes, véritable mise en scène d'une absence de mise en scène, caractérise l'esthétique ascétique de Richard Dindo.

Pour Arthur Rimbaud, une biographie (1991), Richard Dindo, exceptionnellement, a recours à des acteurs (il n'y a plus de témoins, pas d'archives filmées quand on franchit la barrière du temps pour le documentaire : la fin du xixe siècle). Le poète n'est présent qu'à travers son œuvre écrite. Des textes de contemporains sont lus par des acteurs avec une mise en scène minimale, dans des décors sans aménagement particulier : la petite gare d'où partait Rimbaud est délabrée et envahie par les herbes, ce qui accentue le décalage quand Isabelle Rimbaud, en costume d'époque, s'avance sur la voie désaffectée. Le personnage principal s'inscrit ainsi en creux, à la fois absent et présent.

Richard Dindo explique l'apparent détachement de son style par le fait qu'il a déjà pris parti en traitant ce sujet plutôt qu'un autre. « J'ai essayé de revenir au point zéro du mythe Rimbaud, de le déconstruire, de le désacraliser à travers la parole de ceux qui, objectivement, par leurs récits, l'avaient créé : sa sœur, sa mère, Verlaine. À travers ce processus, le film révèle le terrible échec de Rimbaud, que le mythe du poète dissimule. » Filmer un mythe du passé (comme il le refera avec Aragon : le roman de Matisse, 2003, et Wer war Franz Kafka, 2005) est sans doute le point limite de Richard Dindo, lui-même aux limites du documentaire.

Parmi ses autres films ; citons La Répétition (1970) ; Dialogue (1971) ; Raimon, chansons contre la peur (1977) ; H. Staub, reporter photographe, C. Moreau, graphiste (1978) ; Max Frisch, journal[...]

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Écrit par

  • : écrivain et critique de cinéma, ancien chargé de cours à l'université de Paris-VII-Denis-Diderot, docteur de troisième cycle, université de Paris-VII-Denis-Diderot

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