MIQUE RICHARD (1728-1794)
Issu d'une famille d'architectes lorrains qui travaillent pour leur duc, à Nancy et à Lunéville, Richard Mique fait son apprentissage à Strasbourg, avant de venir étudier à Paris, chez J. F. Blondel. La protection de Stanislas Leszczyński, roi de Pologne et duc de Lorraine, lui vaut d'être nommé, dès 1762, ingénieur des Ponts et Chaussées de Lorraine et Barrois. À la mort d'Emmanuel Héré, Mique, anobli, est nommé directeur des bâtiments du roi de Pologne (1763). Les bâtiments qu'il construit à Nancy, la caserne et la porte Sainte-Catherine, la porte Saint-Stanislas (véritables arcs de triomphe) perpétuent le style de son prédécesseur, mais avec un souci de sévérité qui puise sa source dans les théories rigoristes de son maître Blondel. La carrière nancéienne de Mique est de courte durée : à la mort de Stanislas (1766), la reine Marie Leszczyńska fait venir l'architecte de son père ; Mique, honoré du titre d'intendant et contrôleur général des Bâtiments et Jardins de la reine, est chargé de donner les plans d'une maison d'éducation que la reine projetait à Versailles. À la mort de la reine (1768), le projet est repris en main par sa fille, Mme Adélaïde ; Mique, qui peut achever son œuvre (le Couvent de la Reine, aujourd'hui lycée Hoche), est ainsi assuré d'une éminente protection qui le maintient dans sa charge auprès de la nouvelle reine Marie-Antoinette. Après l'avènement de Louis XVI, la démission de Gabriel (1775) lui procure la première place d'architecte de la cour et, à la mort de l'ancien premier architecte (1782), il prend sa place à la direction de l'Académie royale. Sa grande souplesse de talent, prompte à satisfaire ses maîtres, et sa fidélité constante à leur cause, l'exposent aux coups dans la tourmente révolutionnaire. Il est décapité le 8 juillet 1794.
Au cours de sa carrière, succédant par deux fois à de fortes personnalités (Héré, puis Gabriel), Mique ne sait pas échapper à l'influence de ses prédécesseurs qui ont formé le goût des cours de Lorraine et de France. Les prérogatives de sa charge et l'autonomie qu'elle confère sont sans cesse combattues par l'intransigeant comte d'Angiviller, le directeur des Bâtiments du roi, qui protège une nouvelle génération d'architectes, adeptes du néo-classicisme international. La première œuvre versaillaise de Mique, le Couvent de la reine (1767-1772), avec son audacieuse chapelle centrale, s'inscrit pourtant, timidement, dans ce renouveau, et l'architecte aura recours aux mêmes formes élémentaires et expressives pour la chapelle du Carmel de Saint-Denis (1775). Mais l'essentiel de son œuvre témoigne d'un respect un peu attardé pour la tradition française telle que Gabriel l'avait fixée au Petit Trianon. Les fabriques construites autour de ce pavillon, dans un cadre « à l'anglaise » imaginé par le jardinier Richard, assisté du peintre Hubert Robert, sont en harmonie de ton : le Temple de l'Amour (1778), le Belvédère, le Théâtre miniature (1780) et le Hameau rustique (1783-1787) ont une grâce, une joliesse bien éloignées du style robuste des fabriques que Soufflot, Thévenin, Ledoux et bien d'autres construisent dans les parcs de Touraine et d'Île-de-France. Cette élégance, où l'on se plaît à reconnaître le goût de Marie-Antoinette, culmine dans les aménagements d'intérieurs à Versailles (1779-1783), Fontainebleau (1780-1785) et Saint-Cloud (1785-1790), où de petits appartements lambrissés, aux tonalités claires, s'ornent peu à peu de motifs discrets empruntés à l'Antiquité. L'appellation « style Louis XVI » n'aura jamais été mieux justifiée qu'appliquée aux décorations et aux petits édifices de Mique.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Daniel RABREAU : professeur à l'université de Paris-I-Sorbonne, directeur du centre Ledoux
Classification
Média