PEDUZZI RICHARD (1943- )
Né dans une famille italienne à Argentan (Orne), le 28 janvier 1943, Richard Peduzzi, passe son enfance aux côtés de ses grands-parents, dans la ville du Havre dévastée par la guerre et les bombardements. Malgré une scolarité restreinte, il manifeste une appétence pour la peinture et suivra un peu plus tard une formation artistique à l’Académie de dessin de la rue Malebranche à Paris, en particulier sous la tutelle du sculpteur Charles Auffret (1929-2001). Mais il éprouve rapidement le besoin d’échapper aux formes picturales traditionnelles pour mieux trouver matière à s’exprimer dans le décor de théâtre qu’il considère comme « un tableau construit ». Son engagement dans cette voie se concrétise lors de sa rencontre en 1967 avec le metteur en scène Patrice Chéreau (1944-2013), avec lequel il entame une collaboration régulière en tant qu’assistant, au théâtre comme à l’opéra et au cinéma, jusqu’au décès de celui-ci.
Richard Peduzzi devient à partir de 1969 son scénographe attitré avec la reprise du Dom Juan de Molière en ouverture au théâtre de Sartrouville, après sa création à Lyon. Au fil des années, le travail de Richard Peduzzi a été marqué, le plus souvent, par son utilisation d’éléments architecturaux inachevés ou évoquant des ruines, souvent mobiles. Cette élaboration scénographique d’espaces clos ou indéfinis, parfois labyrinthiques, en fonction des nécessités de la représentation, prolonge l’expression du jeu des comédiens ou des chanteurs. L’esthétique inhabituelle et déstabilisante de ses dispositifs a pu un temps choquer avant d’être appréciée par la critique et le public. Parmi les créations marquantes du duo, on peut citer : la tétralogie L’Anneau duNibelung, nommé le plus souvent Le Ring, de Richard Wagner, revisité avec le compositeur Pierre Boulez au festival de Bayreuth (1976), Quartettde Heiner Müller (1985), Hamletde Shakespeare (1988), Phèdre de Racine (2003), La Nuit juste avant les forêts de Bernard-Marie Koltès (2010) ou encore Elektra de Richard Strauss (2013). Au cinéma, toujours avec Patrice Chéreau, Peduzzi s’adapte aux contraintes ou profite des libertés offertes lors du tournage : ainsi avecL’Homme blessé (1983), La Reine Margot (1994), d’après le roman d’Alexandre Dumas père, prix du jury du festival de Cannes, et Tous ceux qui m’aiment prendront le train (1998).
Parallèlement à cette étroite collaboration, Richard Peduzzi crée des décors pour le metteur en scène suisse Luc Bondy (1948-2015) dontLe Temps et la chambre de Botho Strauss (1989), Les Noces de Figaro de Mozart (1995), Tartuffe de Molière (2014) et Ivanov d’Anton Tchekhov (2015). Hors de ses créations scéniques, il s’est investi de différentes manières dans le domaine artistique : comme créateur, dans le cadre du Mobilier national (qui fournit le mobilier des bâtiments officiels de la République française), comme concepteur de diverses expositions en France et à travers le monde, ou encore comme rénovateur, au côté de l’architecte Jean-Loup Roubert, de la bibliothèque-musée de l’Opéra à Paris. En 1990, il devient directeur de l’École nationale supérieure des arts décoratifs (ENSAD) jusqu’en 2002, où il prend la direction de l’Académie de France, située dans la Villa Médicis à Rome, jusqu’en 2008. Richard Peduzzi a publié deux livres, bien illustrés, Là-bas, c’est dehors suivi de L’Odeur du théâtre (2017) et Je l’ai déjà joué demain (2021), qui retracent son parcours et ses aspirations.
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Écrit par
- Jean CHOLLET : journaliste et critique dramatique
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