Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

THURNWALD RICHARD (1869-1954)

Après des études de droit à Vienne, Thurnwald accomplit deux missions en Océanie, d'abord dans l'archipel Bismarck et aux îles Salomon (1906-1919), puis en Nouvelle-Guinée allemande. Après la Première Guerre mondiale, il se rend en Afrique orientale (1930-1931), puis à nouveau aux îles Salomon en 1933. Professeur à l'université de Berlin à partir de 1924, il y enseigne à la fois la sociologie et l'ethnologie. Ses nombreuses publications et son activité au service de la Zeitschrift für Völkerpsychologie und Soziologie (Revue de psychologie des peuples et de sociologie), dont il est le fondateur et qui joue un important rôle de catalyseur dans le développement des sciences sociales, lui procurent une renommée mondiale.

Dès ses premiers travaux ethnographiques, Thurnwald met en évidence les phénomènes d'intégration culturelle et de cohésion sociale, dans une perspective qui s'est avérée après coup rigoureusement fonctionnaliste. Il donne ainsi avant Malinowski la première description du circuit de prestations. Sa foi dans les vertus de l'observation et de la comparaison en soi — qu'il avait héritée du Kulturkreis, et qui l'exposa parfois à des classifications d'intérêt purement documentaire — s'allie à une volonté de systématisation sociologique dont porte témoignage son ouvrage sur les fondements ethno-sociologiques de la société humaine (Die Menschliche Gesellschaft in ihren ethnosoziologischen Grundlagen, 5 vol., 1931-1935). Mettant en évidence les processus typiques d'intégration et d'évolution, il oppose aux thèses diffusionnistes un principe d'explication du changement fondé sur la reconnaissance des impératifs de la cohésion sociale.

La contribution de Thurnwald est particulièrement importante en matière de théories politiques et économiques. Il a notamment étudié les effets qu'engendre dans différentes structures la formation d'une nouvelle strate au plus bas niveau de l'échelle sociale. Cette recherche l'a conduit à formuler des hypothèses nouvelles concernant le développement de la royauté, de la Cité et de l'État ; l'origine de la féodalité et les caractères de l'expansion coloniale en Occident aux xviiie et xixe siècles. En sociologie économique, il offre la première synthèse des données réunies sur les sociétés primitives. Attentif au fondement irrationnel des comportements primitifs, il s'attache cependant à montrer comment les grandes catégories économiques (le commerce, l'argent, la demande, le capital) s'appliquent au mode archaïque. On lui doit en outre des recherches précises sur la technologie et les relations que celle-ci entretient avec les formes d'organisation sociale et économique.

— Claude LEFORT

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales

Classification

Autres références

  • POLYGAMIE

    • Écrit par
    • 9 914 mots
    À la liste donnée plus haut des peuples polyandres, R. Thurnwald ajoute les Guilyaco du nord de la Sibérie et les populations préceltiques de l'Irlande, R. Linton, certaines ethnies de la région des lacs africains et des îles Marquises. Chez les Guilyaco, il ne semble pas qu'il s'agisse d'une...