RITES DE PASSAGE
Les rituels « life-crisis » ou rituels individuels
Les rituels qui soulignent les étapes majeures de la vie d'un individu présentent, dans des sociétés très diverses, la structure tripartite propre aux rites de passage. Ainsi, la naissance, la puberté sociale, les fiançailles et le mariage, la grossesse et l'accouchement, les funérailles sont l'occasion de « crises » individuelles, mais ont aussi une issue qui prend une valeur stratégique pour le groupe. C'est pourquoi tant de sociétés ont marqué rituellement de tels changements d'état dans le flux continu du devenir individuel et ont pris en charge la transition d'un état social à un autre. Par exemple, la section du cordon ombilical à la naissance, aussi bien dans les sociétés paysannes d'Occident que dans d'autres continents, constitue un rite de séparation de l'enfant vis-à-vis de son milieu antérieur (la mère et l'autre monde), ce moment de séparation étant suivi par une phase liminale ( la « liminalité » peut toucher aussi les parents, soumis, par exemple, à une réclusion temporaire), puis par une agrégation définitive au groupe social, qui souvent s'achève par la dation d'un nom à l'enfant. De même, les cérémonies de mariage, dans de nombreuses sociétés, s'ordonnent selon la même séquence tripartite : les « rapts » rituels simulés, par exemple, loin d'être les survivances d'anciennes institutions, visent à marquer la séparation par rapport à l'univers antérieur ; puis le mariage, par là souvent relié aux initiations pubertaires, fait passer de la société enfantine à la société adulte, d'une famille à une autre, ou même d'un village à un autre ; enfin, l'intégration peut être soulignée par des rituels variables (repas en commun, échange de cadeaux, etc.). Quant aux funérailles, elles s'articulent, d'une façon remarquablement constante, selon un schéma identique : la phase de séparation du défunt d'avec le monde des vivants (comportant par exemple la destruction symbolique de sa maison) est suivie d'une période de mise en marge accentuée. Le deuil, pratiquement universel, peut, en effet, être décrit comme une existence en marge pour les survivants, état distinct de celui du défunt et s'exprimant dans les veillées funéraires par exemple. Cet état ambigu qui se trouve engendré, dans une sorte de contagion avec la mort, par les relations de filiation ou d'alliance avec le défunt s'achève avec la levée du deuil. Cette dernière, seuil de la réintégration à une existence « normale », marque, dans certaines sociétés africaines, à la fois le terme de la période de marge de l'âme du défunt, de son errance, et son agrégation définitive dans la société des morts ou son accès au statut d'ancêtre. Chez les Senoufo de Côte-d'Ivoire, ce rituel important de la levée du deuil, auquel participent tous les lignages en relation avec le mort et qui se déroule environ un an après le décès, incorpore le défunt dans le « village des morts » et autorise la veuve à se remarier, alors que jusque-là elle était dans une situation ambivalente et se trouvait soumise à divers interdits.
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Écrit par
- Nicole SINDZINGRE : chargée de recherche au CNRS
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