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RITUEL FUNÉRAIRE ARISTOCRATIQUE (Grèce antique)

Si les vestiges archéologiques de la vie sont souvent ténus et énigmatiques, ceux de la mort sont généralement nombreux et loquaces : l'apparence physique des hommes, leur statut social, leurs croyances, leur goût s'y révèlent ; aussi les tombes sont-elles la grande, parfois même la seule ressource de l'archéologie. Cela vaut également pour la civilisation grecque, quelle que soit la variété des sources documentaires disponibles. Depuis la Seconde Guerre mondiale, un certain nombre de trouvailles spectaculaires ont confirmé l'étonnante pérennité, dans le monde grec, d'un rituel funéraire qui ne fut longtemps connu que par le texte d'Homère.

La découverte à Mycènes, en 1876, d'un groupe de tombes d'une richesse extraordinaire (« cercle A ») avait marqué une étape capitale dans la connaissance de la haute Antiquité grecque : dans l'enthousiasme de sa découverte, Heinrich Schliemann, dont le grand principe était de se fier au texte d'Homère, crut avoir trouvé la tombe du plus glorieux des Atrides, Agamemnon, chef des Achéens coalisés lors de l'expédition contre Troie (vers 1200 av. J.-C.). En fait, le progrès de la fouille a montré que le cercle A est plus ancien de quelque quatre siècles : l'étude d'un second groupe de tombes (« cercle B »), trouvé en 1952, a permis de compléter les observations souvent insuffisantes de H. Schliemann. Les morts, qui ont vécu en moyenne trente-huit ans, sont généralement étendus à même le sol de gravier, au fond de fosses rectangulaires, le visage parfois couvert d'un masque d'or ; près d'eux sont déposés des objets précieux et des armes ; les femmes sont parées de bijoux. Chaque fosse contient deux, trois, voire quatre morts, hommes et femmes ; les objets et les dépouilles humaines elles-mêmes ont parfois été dérangés sans ménagement pour faire place à un défunt nouveau. Ces tombes sont signalées extérieurement par un petit tertre, où est parfois fichée une stèle en pierre ornée de motifs décoratifs ou figurés, sculptés ou peints, ce qui préfigure les tombes archaïques, plus récentes d'un millénaire, sans qu'on puisse pour autant supposer entre les deux une filiation directe : même si l'on note certaines constantes entre le IIe et le Ier millénaire, l'effondrement de la civilisation mycénienne, vers 1150 avant J.-C., marque dans l'histoire grecque une césure profonde, qui fit reculer l'époque antérieure dans un passé épique. Ainsi la guerre de Troie, dont l'Iliade raconte un épisode, est un fait historique d'époque mycénienne mis en scène dans un décor social et matériel d'époque géométrique (1100-700 av. J.-C.). Il est étonnant que H. Schliemann n'ait pas prêté attention à cette distorsion flagrante lorsqu'il crut pouvoir faire coïncider ses trouvailles de Mycènes et le texte d'Homère, car les coutumes funéraires aristocratiques qui y sont évoquées sont très différentes de celles qu'il put constater lors de ses fouilles de Mycènes : au chant XXIII de l'Iliade, le corps de Patrocle est incinéré de nuit au sommet d'un vaste bûcher où Achille a sacrifié quatre chevaux, deux chiens et douze prisonniers troyens ; au petit matin, ses cendres sont recueillies dans une urne d'or qui sera enterrée par la suite sous un tumulus. Longtemps, on n'a voulu voir dans cette scène grandiose qu'une vision littéraire sans grand rapport avec la réalité des pratiques funéraires, mais les données archéologiques récemment acquises ne cessent d'en confirmer la pratique, tout au moins pour les funérailles de « seigneurs » : rois, chefs de clans et aristocrates, depuis l'époque géométrique jusqu'au seuil de l'époque hellénistique.

Le monument extraordinaire trouvé en août 1981 à[...]

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Écrit par

  • : ancien membre de l'École française d'Athènes, professeur émérite d'archéologie grecque à l'université de Paris-X-Nanterre

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