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BADINTER ROBERT (1928-2024)

Robert Badinter représente le modèle de l'avocat ayant réussi une carrière politique. S'il est surtout connu pour son action en tant que ministre de la Justice (1981-1986), et particulièrement pour son combat en faveur de l'abolition de la peine de mort, sa biographie est infiniment plus riche et diversifiée : avocat et professeur de droit, il s'est aussi engagé en politique, tout en développant une importante réflexion intellectuelle. Il a par ailleurs présidé le Conseil constitutionnel de 1986 à 1995.

Né à Paris le 30 mars 1928, il est le fils de parents immigrés juifs russes, qui ont fui les pogroms organisés en 1919 et 1920 par l'armée nationale ukrainienne. Son père sera arrêté à Lyon en 1943 et déporté à Auschwitz. Robert Badinter aura très tôt l'ambition de s'engager dans de nombreux domaines de la vie publique, dans lesquels il s'est montré un défenseur inlassable du droit et des juristes.

Un combat contre la peine de mort

Inscrit au barreau de Paris en 1951, Robert Badinter est d'abord un spécialiste de droit civil : après sa thèse soutenue à la Sorbonne sur « les conflits en matière de responsabilité civile dans le droit des États-Unis » et un ensemble de contributions au droit de l'automobile, il fonde en 1966, avec son ami Jean-Denis Bredin, un cabinet spécialisé en droit des affaires. Mais c'est aux assises qu'il obtient succès et reconnaissance : au début des années 1970, il défend un certain nombre de personnes risquant la peine de mort, notamment Claude Buffet et Roger Bontemps en 1972, puis Patrick Henry en 1976. Par des conférences, des articles et des ouvrages comme L'Exécution (1973), il transforme ces causes pénales et privées en affaires publiques susceptibles de conduire à des actions politiques. Robert Badinter devient ainsi une figure emblématique du combat contre la peine de mort.

C'est à cette époque que François Mitterrand demande à cette personnalité extérieure au Parti socialiste de participer à l'élaboration d'un programme politique sur la justice. Mais Badinter n'était pas neuf en politique : candidat malheureux aux législatives de 1967, il connaissait Mitterrand de longue date, puisqu'ils avaient créé ensemble la Ligue pour le combat républicain à la fin des années 1950, qui deviendra plus tard la Convention des institutions républicaines, autour de laquelle François Mitterrand fondera le Parti socialiste (PS), en 1971. À partir de 1974, Robert Badinter organise un groupe de réflexions, directement rattaché à la personne du premier secrétaire du PS, chargé d'élaborer une « charte des libertés et des droits fondamentaux », et dont les conclusions seront publiées sous le titre de Liberté, libertés en 1976. Les travaux de la commission se retrouvent dans le chapitre sur la justice des 110 propositions de François Mitterrand, candidat PS à l’élection présidentielle de 1981.

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Écrit par

  • : maître de conférences en sociologie à l'université de Poitiers, chercheur au C.U.R.A.P.P., C.N.R.S., université d'Amiens

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Média

Robert Badinter - crédits : Michel Philippot/ Sygma/ Getty Images

Robert Badinter

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