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FABRE ROBERT (1915-2006)

La carrière politique de Robert Fabre illustre les hésitations et les incertitudes d'un radicalisme mal à l'aise dans les structures et les pratiques d'une Ve République dont la bipolarité heurte la vocation centriste des radicaux et dont l'aspiration à la modernité convient mal à un parti qui représente traditionnellement la classe moyenne indépendante de province.

De cette dernière, Robert Fabre est un typique représentant. Né dans l'Aveyron, à Villefranche-de-Rouergue, le 21 décembre 1915, il suit les traces de son père et devient pharmacien. Notable local, il est élu maire de sa commune de naissance, membre du conseil général de l'Aveyron et, en 1962, député de son département d'origine, mandats qu'il conservera durant la totalité de sa vie politique. Laïque convaincu, tenant de la conception républicaine des institutions qui voit dans le Parlement le seul délégataire légitime de la souveraineté nationale, il est naturellement membre du Parti radical, adversaire du gaullisme et siège à l'Assemblée nationale au sein du groupe du Rassemblement démocratique, qui réunit les radicaux et des députés de centre gauche, tel François Mitterrand.

Le rôle politique national de Robert Fabre débute avec la candidature de ce dernier à la présidence de la République contre le général de Gaulle en 1965. Ferme soutien du « candidat unique de la gauche », il participe au lendemain du scrutin à la tentative de création d'une Fédération de la gauche démocrate et socialiste qui rassemble la S.F.I.O., le Parti radical et les clubs de la Convention des institutions républicaines (C.I.R.) regroupés par François Mitterrand. Ce dernier le nommera membre du « contre-gouvernement » qu'il constitue en mars 1966, le chargeant de la responsabilité du développement régional.

Aussi, c'est sans enthousiasme que Robert Fabre considère l'ascension au sein du Parti radical de Jean-Jacques Servan-Schreiber, nommé secrétaire général en 1969 et qui évince de la présidence Maurice Faure en octobre 1971. Il n'apprécie ni son style flamboyant, ni ses initiatives spectaculaires, ni son obsession de la modernité, qui contrastent si fort avec la prudence et la modération radicales. Surtout, il n'accepte pas l'alliance que le nouveau président s'empresse de conclure avec les modérés et les démocrates-chrétiens du Centre démocrate pour constituer avec eux le Mouvement réformateur. Dès le début de 1972, Robert Fabre prend la présidence d'un « Groupe d'études et d'action radical-socialiste » qui entend maintenir le Parti radical dans l'Union des gauches. Passant des accords électoraux avec les socialistes dès juin 1972, il signe en juillet, au nom de ses amis, le Programme commun de gouvernement négocié par les partis communiste et socialiste. Suspendus de leur adhésion au Parti radical, Robert Fabre et ses collègues du Groupe d'études franchissent le pas et font scission pour créer à l'automne de 1972 le Mouvement de la gauche radicale-socialiste, qui prendra en 1973 le nom de Mouvement des radicaux de gauche, toujours présidé par Robert Fabre.

Toutefois, homme de compromis et de modération, Robert Fabre ne tarde pas à se sentir mal à l'aise au sein d'une Union des gauches que la rivalité de moins en moins dissimulée entre socialistes et communistes tend à raidir dans une opposition sans concession. En 1974, il est vivement critiqué pour avoir accepté de rencontrer le nouveau président de la République, Valéry Giscard d'Estaing. Les surenchères communistes lors de l'actualisation du Programme commun de gouvernement en septembre 1977 l'exaspèrent et le conduisent à dénoncer celui-ci. Réélu en 1978 député de l'Aveyron, il accepte la mission que lui confie Valéry Giscard d'Estaing – étudier les moyens de lutter contre le chômage –, ce qui[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités à l'Institut d'études politiques de Paris

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