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FILLIOU ROBERT (1926-1987)

Le Territoire de la République géniale

En 1970, Robert Filliou publie Teaching and Learning as Performing Arts (en collaboration avec Beuys, Cage et Kaprow). La même année, il réalise Commemor, proposant « aux pays qui songeraient à faire la guerre d'échanger leurs monuments aux morts avant et au lieu de se la faire ». Un an plus tard, Filliou crée le Territoire de la République géniale (tendant à abolir les barrières entre l'art et la science) dont il montre les premières « recherches » au Stedelijk Museum d'Amsterdam (1971). « J'avais l'idée de créer mon propre territoire et, bien sûr, de proposer aux autres également de créer le leur. Je me disais que les gens qui vivraient dans un tel territoire passeraient leur temps à développer leur génie plutôt que leurs talents. » Utopiste intégral dans la lignée de Fourier, Filliou pense que « tout le monde est parfait » et imagine à cet effet la « Parfaitologie ». En faisant de l'Imagination et de l'Innocence les emblèmes de sa démarche, l'artiste entend réconcilier l'art et la science, l'économie et la poésie. « Je pense aux travailleurs sans lesquels il ne peut y avoir la poésie. Je conçois des projets, pour trouver comment la poésie, qui est futile, pourrait leur être utile. En d'autres termes comment concilier la gnose, si gaie, à l'économie, si sinistre ».

En 1975, Filliou s'installe à Flayosc dans le Var. Marianne crée le « Cucumberland », territoire mimétique de la République Géniale. Filliou réalise en vidéo ses Hommages aux Dogons ainsi que sa série Telepathic Music. En 1980, il quitte le Var pour les Eyzies en Dordogne, afin de se rapprocher d'un monastère bouddhiste. « Ce que je tiens pour le secret absolu de la création permanente est ce que j'ai appelé le „Filliou idéal“, lors d'une performance au café à Go Go à New York en 1965. Ce secret vient de la tradition Sōtō zen qui dit : ne rien choisir, ne rien désirer, pleinement éveillé, tranquillement assis, sans rien faire. » Après ses rétrospectives (The Eternal Network) au Sprengel Museum de Hanovre, à la Kunsthalle de Berne et au musée d'Art moderne de la Ville de Paris (1984), il entre en retraite pour trois ans, trois mois et trois jours au Centre d'études tibétaines de Chanteloube en Dordogne, où il meurt le 2 décembre 1987, emporté par un cancer.

Les grandes rétrospectives posthumes de Bâle, de Hambourg, du Centre Georges-Pompidou (1990) et du musée d'Art contemporain de Nîmes (1990-1991) soulignent l'importance de l'œuvre de Robert Filliou dans l'art de la deuxième partie du xxe siècle et son influence décisive sur la scène de l'art contemporain. « La création permanente peut être aussi le „Travail comme Jeu“ et „l'Art comme Pensée“, je me considère comme un animateur des pensées et je conçois les œuvres d'art comme un échange de nourriture. »

— Bernard MARCADÉ

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Écrit par

  • : critique d'art, professeur d'esthétique à l'École nationale d'arts de Cergy-Pontoise

Classification

Autres références

  • BRECHT GEORGE (1926-2008)

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