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OWEN ROBERT (1771-1858)

Né au pays de Galles, Robert Owen partit de rien et devint à vingt-huit ans le propriétaire d'une importante manufacture de coton à New Lanark (Écosse). Industriel philanthrope, paternaliste et autoritaire, il en fait une usine modèle, bientôt célèbre à travers l'Europe. Ses innovations pédagogiques en particulier retiennent l'attention : jardin d'enfants, méthodes actives, cours du soir. Owen mène aussi campagne auprès du pouvoir pour l'amélioration des conditions du travail ouvrier, pour la réduction du temps de travail et la réglementation du travail des enfants. Riche et influent, il perd progressivement ses soutiens au Parlement en raison de la critique sociale radicale qu'il entreprend. En 1817, ses projets de « villages de coopération » pour les pauvres, alternative à la société de compétition capitaliste, s'accompagnent d'une dénonciation fracassante de toutes les religions. Selon Owen, l'érection de communautés autonomes de travailleurs (groupant de cinq cents à deux mille personnes) résoudra la question sociale et inaugurera un nouvel ordre mondial. Ne parvenant pas à les réaliser, Owen passe aux États-Unis en 1824 et achève d'engloutir sa fortune dans l'éphémère communauté de New Harmony. Après un espoir de colonisation communautaire du nord du Mexique, il se retrouve en Angleterre, en 1829, à la tête d'un réseau de coopératives, puis d'un système de bourses du travail, enfin d'une considérable mais éphémère union syndicale, la Grand National Consolidated Trades Union (1834), où une large fraction de la classe ouvrière se rallie à lui : autant d'échecs. Il revient alors plus directement à la propagation de ses propres idées, notamment avec son ouvrage Le Livre du nouveau monde moral (Book of the New Moral World, 1834-1845), qui présente l'ensemble de sa doctrine. À travers plusieurs regroupements, telle l'Association de toutes les classes de toutes les nations, se développe un mouvement qu'on appellera le socialisme. À son apogée, vers 1840, celui-ci touche des dizaines de milliers d'ouvriers et d'artisans, galvanisés par l'attente et la préparation de la « communauté », avènement imminent d'un monde égalitaire et fraternel, dont le succès sera tel que, par contagion, il gagnera la planète. L'enthousiasme provoqué par cette vision pallie l'inexistence de cette communauté jusqu'à ce que la pression du mouvement finisse par forcer ses chefs à officialiser la création de l'exploitation communautaire de Queenwood (Hampshire, 1839). Ses déboires et son échec (1845) entraînent l'effondrement du mouvement.

Les « socialistes » menèrent une critique permanente de l'oppression de la femme, de la propriété privée et du christianisme officiel en raison de son rôle dans l'exploitation de la classe ouvrière. D'où une violente opposition venue du clergé. Incapables d'analyse politique cohérente, les owénistes suivirent une dynamique sectaire qui fit progressivement d'eux un organisme religieux, animés moins par le millénarisme déiste d'Owen que par la conscience d'être les véritables chrétiens mettant en pratique les enseignements du philanthrope Jésus.

Après l'échec du « socialisme », Owen continua, jusqu'à quatre-vingt-sept ans, de multiplier les projets de réforme sociale en harcelant les gouvernements du monde entier, adoptant alors un spiritisme millénariste. Autodidacte aux idées simplistes inlassablement répétées, il fut durant des dizaines d'années un prodigieux animateur social ; sa séduction sur les foules et sa générosité d'esprit masquaient l'inconsistance de ses théories économiques et sociales. Créateur du premier mouvement appelé socialisme, ancêtre supposé des systèmes coopératifs, critiqué non sans vénération par Marx et Engels, il est l'un des[...]

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Écrit par

  • : chargé de cours à l'Institut catholique de Paris

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