SIOHAN ROBERT (1894-1985)
Musicien universel, Robert Siohan avait choisi de servir son art en écartant d'emblée toute idée de carrière personnelle. Compositeur, chef d'orchestre, journaliste, musicologue, il était l'un des rares survivants d'une génération qui avait vécu la grande mutation post-debussyste et défendu avec vigueur les nouveaux courants musicaux.
Né à Paris le 27 février 1894, il fait ses études musicales au Conservatoire où, entre 1909 et 1922, il est notamment l'élève d'Alexandre Lavignac, Georges Caussade et Charles-Marie Widor. Il remporte des premiers prix d'alto, de contrepoint et de fugue avant de travailler avec Vincent d'Indy, qui le pousse vers la direction d'orchestre. Il débute comme altiste à la Société des concerts du Conservatoire et voit ses premières œuvres couronnées du prix Halphen (Quatuor à cordes, 1922) et du prix Blumenthal (Symphonie, 1925-1926, Quatuor et mélodies). On lui doit la première audition parisienne du Roi David d'Arthur Honegger (1924). Il commence à acquérir une certaine notoriété de chef d'orchestre et dirige régulièrement aux Concerts Pasdeloup. En 1929, il fonde son propre orchestre, les Concerts Siohan, qui deviennent l'une des formations les plus dynamiques de la capitale, ouverts à la nouvelle musique et aux jeunes interprètes. Mais, devant les problèmes financiers qui s'accumulent, ils fusionnent, en 1935, avec les Concerts Poulet, avant de disparaître l'année suivante. Siohan crée notamment, à la tête de son orchestre, des œuvres de Milhaud, Honegger et Ibert ainsi que L'Ascension de Messiaen (1934). De 1932 à 1946, il est chef des chœurs à l'Opéra de Paris puis professeur de déchiffrage au Conservatoire (1948-1962) et inspecteur général de la musique au ministère des Affaires culturelles (1962-1964). Il soutient en Sorbonne une thèse sur Les Théories nouvelles de l'harmonie (1954) qu'il publie sous le titre d'Horizons sonores, évolution actuelle de l'art musical (1956).
Ses premières œuvres s'inscrivent dans la ligne néo-classique qu'il ne quittera guère. Doué d'un sens mélodique spontané, il recherche les édifices solidement construits, en disciple de Vincent d'Indy, laissant évoluer son inspiration sur une harmonie librement tonale. Il restera toujours étranger aux courants aléatoires. Son œuvre s'échelonne sur plus d'un demi-siècle, bien que le chef d'orchestre et le critique musical aient relégué dans l'ombre le compositeur. On lui doit un opéra, Le Baladin de satin cramoisi (livret de René Morax, 1926-1927), et un ballet, Hypérion (1938), des œuvres symphoniques, In memoriam, op. 3 (1922), Symphonie, op. 6 (1925-1926), Concerto pour violon, op. 14 (1927), Concerto pour piano, op. 15 (1939), de la musique de chambre et instrumentale — Quatuor, op. 2 (1922), Mallarméennes pour piano, op. 17 (1945), Gravitations pour alto et piano (1952) — et des mélodies. Après une période de silence d'une vingtaine d'années consacrée surtout à la musicologie et à la critique, il compose deux œuvres chorales avec orchestre, Images chorégraphiques et Jeux phonétiques (1972), Trois Dialogues pour violon et piano (1975), un Quatuor avec piano (1977) et Thrène (1982). Il a été, pendant plusieurs années, critique musical au journal Le Monde et à Combat, collaborant également à la Revue d'esthétique. Il est l'auteur de nombreux écrits, parmi lesquels Stravinski (1959) et La Musique étrangère contemporaine (1954), rééd. sous le titre La Musique étrangère au XXe siècle, 1984.
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
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