ROCHES LUNAIRES
Origine et évolution de la Lune
Les échantillons lunaires étudiés jusqu'à aujourd'hui ne représentent qu'une fraction minuscule de la surface de la Lune. Toutefois, ils ont permis d'obtenir une variété énorme d'informations sur les processus de formation de cette surface. Cependant, tous ces résultats n'ont pas encore résolu le problème de l'origine de la Lune. Les trois théories classiques sur la formation de la Lune sont la capture de la Lune par la Terre, la fission de la Lune et de la Terre, et la formation simultanée de deux planètes jumelles. Aucune de ces théories n'est compatible avec les résultats obtenus jusqu'à présent. La théorie de la capture achoppe sur des problèmes de dynamique. La Lune ayant la même composition en isotopes de l'oxygène que la Terre, a dû d'ailleurs se former dans la même région du système solaire. La théorie de la fission se heurte à des difficultés surtout chimiques : les différences fondamentales de proportions en éléments réfractaires (beaucoup plus abondants sur la Lune) et volatils (beaucoup plus abondants sur la Terre) devaient être établies dans les matériaux qui précédèrent la formation de la Terre et de la Lune. Un autre scénario a été proposé dans les années 1970 : la Lune se serait formée par accrétion de débris issus d'une collision entre une proto-Terre et une protoplanète.
Quoiqu'il en soit, la Lune existait en temps que corps céleste il y a 4,5 milliards d'années ; elle subit une différenciation magmatique majeure vers cette époque, avec formation d'une croûte de roches feldspathiques, d'un manteau peut-être stratifié (à pyroxène et olivines plus riches en magnésium vers le haut, en fer vers le fond), de quelques liquides résiduels enrichis en certains éléments chimiques, et probablement d'un petit noyau riche en fer et/ou en sulfure de fer. On peut expliquer les différences d'épaisseur de la croûte (100 km sur la face cachée, 60 km sur la face visible) soit par la flottation du feldspath dans un champ asymétrique contrôlé par la Terre voisine, soit par les différences dans l'intensité du bombardement entre les deux côtés. La Lune était entourée de subsatellites qui, par effets de marée, finirent par l'emboutir (entre − 4,2 et − 3,9 milliards d'années), creusant de profondes dépressions et modifiant son axe de rotation, comme on peut s'en rendre compte par les données paléomagnétiques. Le remplissage des grandes dépressions par des coulées de basaltes, de − 3,9 à − 3,1 milliards d'années, formant les mascons, fixa la position actuelle. Le centre de gravité de la Lune est d'ailleurs décalé de 2 km par rapport à son centre géométrique.
Puis il ne se passa presque plus rien, la Lune refroidit progressivement, le flux de projectiles décrut rapidement pour se stabiliser au rythme d'un objet kilométrique par million d'années depuis 3 milliards d'années environ ; le régolite recouvrit les grands lacs de lave et les continents tout en se fragmentant de plus en plus finement.
On sait très peu de chose sur la nature chimique des corps qui ont bombardé la Lune. La plus grande partie semble avoir été volatilisée. Par le calcul et à partir des analyses chimiques des sols, on estime que la proportion de matériel chondritique dans le régolite est de 1 à 2 p. 100. Il faut cependant remarquer que les gros projectiles ayant percuté la Lune au début de son histoire ne sont peut-être plus représentés par les types de météorites actuellement capturés par la Terre.
La chronologie des événements lunaires montre donc que des faits importants se sont produits entre − 4,5 et − 3,1 milliards d'années. On peut se demander si les mêmes processus de bombardements n'ont pas eu lieu sur la Terre et n'ont pas affecté fortement les débuts de l'histoire[...]
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Écrit par
- Mireille CHRISTOPHE MICHEL-LEVY : directeur de recherche au C.N.R.S.
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