RODIN EN 1900. L'EXPOSITION DE L'ALMA et RODIN ET L'ITALIE (expositions)
L'extraordinaire popularité de Rodin est due autant à la large diffusion de son œuvre qu'aux innombrables commentaires suscités par elle du vivant même de l'artiste, le tout renforcé par le rayonnement du musée Rodin. Ce dernier a son origine dans le legs, fait à la France par l'artiste, de son fonds d'atelier et de ses collections, désormais conservées dans ce qui fut sa dernière résidence parisienne, l'hôtel Biron rue de Varenne, et sa villa-atelier de Meudon. Cette institution a déjà beaucoup fait pour conserver la mémoire de Rodin à partir de ses propres ressources, uniques et considérables. Dans ces conditions était-il encore possible d'apporter du neuf ? Deux expositions organisées au printemps 2001 par l'équipe du musée, sous l'égide d'une de ses responsables les plus actives, Antoinette Le Normand-Romain, ont montré que tout n'avait pas été dit sur Auguste Rodin.
La première et de loin la plus importante, Rodin en 1900. L'exposition de l'Alma (musée du Luxembourg, Paris, 12 mars-15 juillet 2001), commémorait, avec un an de retard, la rétrospective personnelle organisée par l'artiste en marge de l'Exposition universelle de 1900. Fondée sur des recherches d'archives très approfondies, elle présentait l'essentiel des marbres et des plâtres, des dessins et des photographies exposés un siècle plus tôt, et visait à une reconstitution historiquement et esthétiquement la plus exacte possible en renouant avec la démarche même de Rodin. Celui-ci, en effet, se préoccupa soigneusement, en 1900, de l'image qu'il voulait donner au public, excluant ainsi Le Baiser, groupe qu'il ne jugeait plus, à cette date, suffisamment représentatif de son travail. Il exposa aussi des dessins, ainsi que des photographies de ses œuvres commandées spécialement à Eugène Druet. Rodin fut très attentif aux conditions mêmes de l'exposition. D'abord dans le choix de l'architecture très lumineuse du pavillon (évoqué judicieusement au musée du Luxembourg par une maquette) qu'il fit bâtir spécialement place de l'Alma, et qu'il fit reconstruire dans le jardin de sa villa de Meudon. En décidant de montrer beaucoup de marbres et de plâtres Rodin avait fait le choix de la blancheur, impression retrouvée là encore au Luxembourg, grâce à la verrière zénithale, à l'appoint électrique et au choix d'un découpage des salles au moyen d'un tissu très clair. Quant à la présentation, les organisateurs ont suivi au plus près le parti décidé par Rodin en 1900 ou l'ont évoqué par analogie.
La seconde exposition, Rodin et l'Italie, de portée plus modeste, et d'esprit plus classique, était organisée à la Villa Médicis (5 avril-9 juillet 2001), siège de l'Académie de France à Rome. L'occasion de présenter les rapports étroits entretenus par Rodin avec l'Italie avait été fournie par la restauration, menée sous les yeux du public, de la fonte originale des Bourgeois de Calais. L'Italie ne fut jamais absente des préoccupations de Rodin, marqué par l'Antiquité, la sculpture italienne, Michel-Ange et Bernin notamment, et plus généralement par l'art italien qu'il connut directement à plusieurs reprises en 1876, en 1912, 1914 et 1915. Il s'en inspira autant que de Dante, qui lui fournit une thématique inépuisable, d'Ugolin à La Porte de l'Enfer. L'exposition romaine a repris en détail ces différents points, à partir d'œuvres originales mais aussi grâce à de nombreux documents, manuscrits, livres ou photographies d'époque.
Que Rodin se soit volontairement placé dans la continuité de ses prédécesseurs, et ait voulu créer des formes modernes, mais ancrées dans la tradition, l'exposition à la Villa Médicis l'a montré nettement. Mais qu'il annonce ou qu'il anticipe[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Barthélémy JOBERT : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
Classification