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VIEILLARD ROGER (1907-1989)

Avec Hayter et Courtin, Roger Vieillard est l'un des rares burinistes du xxe siècle à avoir innové et à s'être pleinement engagé dans la modernité. Il est né le 9 février 1907 au Mans où son père était en garnison. Son grand-père paternel avait, à Bordeaux, une fabrique de faïence fort réputée, et l'un de ses arrière-grands-pères, le peintre Albert Magimel, avait été élève et ami d'Ingres.

Bon latiniste, excellent joueur de tennis, mais sans vocation apparente pour les arts, Roger Vieillard fait à Paris des études de lettres, et passe une licence de droit. Parallèlement au métier de banquier qu'il exerce pendant trente-cinq ans, il entreprend à vingt-sept ans un œuvre de graveur très singulier qui va faire sa célébrité.

Il doit sa vocation et son initiation aux techniques de la taille-douce au peintre et graveur anglais Stanley William Hayter qu'il rencontre en 1934. De 1935 à 1937, il fréquente assidûment son atelier, le célèbre Atelier 17.

Il y fait connaissance avec l'extraordinaire buriniste qu'est Joseph Hecht et avec les peintres abstraits et surréalistes de l'avant-garde, venus s'essayer à la gravure.

1938 est 1'année de son mariage avec le peintre américain Anita de Caro. En 1939, Jack Kahan, l'éditeur de Henry Miller, publie le premier grand livre illustré par Roger Vieillard : La Fable de Phaéton d'Ovide, très belle évocation d'un mythe antique. Jeanne Bucher, qui l'a toujours encouragé, organise en 1942 sa première exposition personnelle et édite l'année suivante son premier recueil d'estampes : Paysages de France, dans lesquels se rencontrent, sans heurt, le rêve d'un poète et l'œil du géomètre.

Alors que la vie intellectuelle et artistique reprend après guerre, Roger Vieillard noue d'étroites relations avec les artistes de la jeune École de Paris dont il se sent proche, avec Raoul Ubac et les peintres de l'abstraction lyrique Jean Bazaine et Alfred Manessier. Il se lie avec Jacques Villon, qu'il a toujours admiré, et avec Chagall, qu'il rencontre en 1957.

La même année, un voyage en Grèce lui révèle le pouvoir purificateur de la lumière et entraîne dans son œuvre, qui prend un caractère abstrait, une simplification accrue de la composition.

Sensible à l'œuvre des poètes, il illustre les livres de ses amis : Jours pétrifiés de Jean Tardieu, édité par la N.R.F. en 1947, et Chemins du vain espoir d'André Frénaud, paru chez Michel de Romilly en 1956.

Les expositions personnelles se multiplient (Galerie de France, Adrien Maeght, La Hune, Galerie Coard et Sagot-Le Garrec). Les rétrospectives se succèdent à partir de 1972 à la Bibliothèque nationale et dans les musées. L'Institut lui ouvre les portes de l'Académie des beaux-arts en 1989, peu de temps avant sa mort.

Échelonné sur plus d'un demi-siècle, l'œuvre gravé de Roger Vieillard, conservé dans sa presque totalité à la Bibliothèque nationale, comporte quelque trois cent cinquante pièces.

Le choix quasi exclusif du burin est par là même celui du noir et blanc et d'un trait précis, sans repentir possible. L'œuvre lui doit sa grande clarté et l'unité d'un style, dès le départ volontaire et personnel. Vieillard ne suit pas la tradition du burin tel qu'il est pratiqué en France depuis des siècles de Nanteuil à Decaris, avec tailles et contre-tailles. Il n'utilise que rarement le dynamisme propre au trait gravé qui est la grande révélation de son ami Hayter. L'originalité de son travail réside dans ces formations graphiques telles qu'il en a observé chez Mantegna ou chez Klee, constituées d'un réseau de lignes et de points d'une étonnante variété : tailles profondes ou légères, plus souvent courtes que longues, parallèles ou croisées, donnent à la planche sa couleur et son harmonie. Sobres et lumineux, les burins de Vieillard se caractérisent[...]

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Écrit par

  • : conservateur en chef au Cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale chargée de l'estampe du xxe siècle

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