ROLLINS THEODORE WALTER dit SONNY (1929- )
Comment se résoudre à choisir entre ses admirations quand on grandit au milieu des géants qui dominent le monde du jazz de l'après-guerre ? Au cours d'une très longue carrière, le saxophone ténor américain Sonny Rollins semblera hésiter sans cesse entre les styles les plus variés et chercher éternellement sa propre voie, et cela sans fuir la confrontation, au disque comme au concert, avec ses idoles – Coleman Hawkins, Charlie Parker – ni nier la fascination qu'il éprouve devant l'envol d'un météore nommé John Coltrane et les premiers élans libertaires du free jazz. Multiple dans ses goûts et dans ses choix, il reste unique par sa volonté d'exploration et cette façon très personnelle d'unir ce qui paraît inconciliable : tradition et modernité.
Saxophone Colossus
Theodore Walter Rollins voit le jour à New York le 7 septembre 1930. Il s'initie d'abord au piano et fréquente à Harlem, dès la sortie de l'école, les spectacles de l'Apollo. Pour ses huit ans, sa mère lui offre un saxophone alto, instrument qu'il va pratiquer à la manière de Louis Jordan. Il opte cependant rapidement, vers onze ans, pour le saxophone ténor. En 1947, il fait ses débuts dans des orchestres de rhythm and blues et manifeste par la force de son expressivité sa filiation avec Ben Webster et Coleman Hawkins. Sa réputation s'étend alors qu'il s'ouvre aux conceptions parkériennes. Dès 1949, il joue au sein du quintette et du sextette de J. J. Johnson – où il a pour partenaires des musiciens de la stature de John Lewis ou de Max Roach – et il enregistre également avec les Modernists de Bud Powell, aux côtés de Fats Navarro, Tommy Potter et Roy Haynes. De 1951 à 1956, il va réaliser de très nombreux enregistrements avec des partenaires aussi prestigieux que Miles Davis, John Lewis et le Modern Jazz Quartet (Sonny Rollins With The Modern Jazz Quartet, 1953), Art Farmer (Art Farmer, 1954), Thelonious Monk (Brilliant Corners, 1956), Roy Haynes et Max Roach. Dans l'un des albums les plus célèbres de cette période – Collector's Items (qui rassemble des sessions s'étendant entre 1951 et 1956) –, il rejoint, au sein des sextettes et quintettes de Miles Davis, Jackie McLean, Walter Bishop, Jr., Tommy Potter, Art Blakey, Percy Heath, Philly Joe Jones, Tommy Flanagan, Paul Chambers, Art Taylor, et – c'est une rareté au disque – Charlie Parker au saxophone ténor, lors de la session du 30 janvier 1953. En décembre 1955, Sonny Rollins remplace Harold Land dans le quartette qu'animent Max Roach et Clifford Brown. Il y gardera sa place quelques mois encore après la mort accidentelle du jeune trompettiste, le 26 juin 1956, puis fondera ses propres groupes.
Le 24 mai 1956, dans les studios de la firme Prestige, il offre à un John Coltrane encore inconnu et influencé par lui une mémorable « chase » sur Tenor Madness. La même année, il pose les bases d'un nouveau classicisme, grâce à un album-jalon, Saxophone Colossus, avec un quartette comprenant Tommy Flanagan, Doug Watkins et Max Roach. Cela ne l'empêche nullement de révéler un tempérament explosif dans un discours échevelé tenu en compagnie de Wilbur Ware et d'Elvin Jones (A Night At The Village Vanguard, 1957), ni d'alterner avec une musique plus apaisée en retrouvant Dizzy Gillespie, Sonny Stitt et Ray Briant (Sonny Side Up, 1957). Devenu l'un des plus purs représentants du hard bop, Sonny Rollins va marquer de son influence toute une génération de souffleurs : Hank Mobley, Johnny Griffin, Charlie Rouse, Teddy Edwards, Yusef Lateef, Stanley Turrentine, Clifford Jordan, Roland Kirk, Joe Henderson, Walter Benton, Wayne Shorter, Billy Mitchell, Booker Ervin... À partir de Freedom Suite, gravé en 1958 avec un trio composé du fidèle Max Roach et d'Oscar Pettiford, Sonny Rollins réduit progressivement[...]
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Écrit par
- Pierre BRETON : musicographe
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- Écrit par Pierre BRETON
- 1 065 mots
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