ROM
L'affirmation contemporaine du peuple rom
Entre discrimination et intégration
En Europe occidentale, rejet et ségrégation continuent à se manifester après guerre par les interdictions de stationner faites aux populations nomades, voire le refus de citoyenneté (comme à Cologne dans les années 1950) ou l'envoi en camps de travail.
Toutefois, les législations spécifiques contre les Rom reculent (1969 : remplacement du carnet anthropométrique, institué le 16 juillet 1912 en France, par un carnet de circulation, moins discriminatoire) et font place à d'autres, plus positives (1990 : loi Besson imposant à toute commune de plus de cinq mille habitants une aire de stationnement, à l'instar du Caravane Site Act de 1968 en Grande-Bretagne). De multiples organismes publics et privés apportent une aide paternaliste aux Rom, considérés comme une classe sociale d'exclus qu'il importe d'assimiler à la société dominante ; en même temps, les effets intégrateurs des multiples textes de lois à portée générale étouffent de plus en plus la vie normale de la plupart des Rom non intégrés et les réduit à être des assistés. L'application restrictive des textes par les élus locaux, préoccupés de visées électorales, voire leurs entorses à la loi au détriment de ces citoyens qui ignorent leurs droits, marginalise ces derniers et justifie par contrecoup les activités de bienfaisance à leur endroit.
Dans les pays de l'Est, les Rom sont d'abord reconnus implicitement comme une minorité, sur le modèle soviétique d'avant guerre – modèle qui alors n'a déjà plus cours en U.R.S.S. Puis, sous la férule gouvernementale, des pseudo-organisations sont créées, maintenues et dissoutes au gré des diktats, au mépris des aspirations et des besoins des Rom. Des initiatives individuelles sont tolérées (comme la création en Hongrie, par Lina Rézmūves en 1970, d'une petite école qui enseigne en romani ou de la troupe du théâtre amateur Roma, près de Prague), lorsqu'elles ne sont pas récupérées, comme les vers de la poétesse rom de Pologne Papùśa (Bronisłava Wajs) – happés par la propagande de « sédentarisation-productivisation » des années 1950.
La Yougoslavie titiste est plus ouverte, mais elle ne finance guère que les manifestations folkloriques des Rom, comme leur festival annuel (Smotra). Ce sont des amateurs bénévoles qui assurent à Belgrade l'heure de radio hebdomadaire Aśunen Rroma !len (Écoutez, les Rom !) et publient les quatorze numéros de la revue Krlo e Rromenqo (La Voix des Rom). Si disques et cassettes de musique sont produits, le but reste commercial. En outre, la propagande fait passer pour des « écoles de romani » quelques cours optionnels dans certains établissements du sud de la Serbie. L'État organise parfois des symposiums et conférences ou publie dans le domaine romani, mais il le fait sur des initiatives individuelles, qui savent exploiter les contradictions sur ce point entre les Constitutions fédérale et républicaine.
L'après-guerre froide
Le remodelage de l'Europe en 1989-1990 entraîne à la fois une radicale aggravation des conditions de vie des Rom dans les pays de l'Est et, par contrecoup, une meilleure organisation au niveau national et européen. Partout le chômage frappe d'abord les classes les plus défavorisées : les ouvriers les moins qualifiés et les travailleurs agricoles qui perdent leur emploi avec la reprivatisation des terres. Or l'écrasante majorité des Rom appartient à ces catégories ; ils se retrouvent sans la moindre ressource, affamés. Une fois leur maison et autres biens vendus pour survivre, sans espoir de travail, certains deviennent des petits délinquants ou tentent d'émigrer vers les pays riches. Misérables, il sont mis au pilori par les groupes racistes, parfois avec la complicité ouverte de la presse, comme en Bulgarie en 1991 et 1992. Si[...]
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Écrit par
- Marcel COURTHIADE : responsable de langue et civilisation romi à l'Institut national des langues et civilisations orientales, secrétaire adjoint de l'Union romani internationale
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