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CHEVALERIE EN ESPAGNE ROMANS DE

La lignée d'« Amadis »

Nous aurions donc jusqu'ici :

1. Trois livres anciens remaniés par Montalvo. Le premier livre conte les amours secrètes d'Elisena, fille d'un roi chrétien de la Petite Bretagne et de Perion, roi de Gaule. Amadis, né secrètement de cette union, est déposé dans un coffre, jeté dans un fleuve, recueilli par le chevalier Gandales et remarqué par le roi Languines, qui l'emmène à sa cour. C'est là qu'Amadis s'éprend d'Oriane. Au livre II se multiplient aventures et enchantements. Oriane, en grand secret, s'est donnée à Amadis. Au livre III, Montalvo semble avoir introduit lui-même la naissance secrète d'Esplandian, fils d'Amadis et d'Oriane. À la fin de ce livre, et tel était peut-être le premier dénouement du roman, Amadis se retire dans l'île Ferme après une grande victoire sur le monstre de l'île du Diable et après avoir libéré Oriane ravie par l'empereur des Romains.

2. Un livre IV, création de Montalvo, où l'auteur a marié bien légitimement les deux héros, ainsi que tous les couples qui gravitent autour d'eux. Ce livre est moins un roman qu'une doctrine de chevalerie et Amadis n'est plus un chevalier errant, mais un monarque exemplaire. On entend par Amadis ces quatre livres.

3. Les Exploits d'Esplandian (Sergas de Esplandián), œuvre de Montalvo.

Ce schéma a été considérablement remanié par une étude de J. M. Cacho Blecua qui, après une rigoureuse analyse des structures et des thèmes de l'œuvre, propose pour sa généalogie les étapes suivantes : a) Une rédaction primitive probablement composée en Espagne entre 1304 et 1312 et dont la trame romanesque serait semblable à celle de l'édition de 1508. Cette rédaction cohérente aurait eu pour dénouement l'épreuve d'Oriane à l'île Ferme. b) Une deuxième version, divisée tout d'abord en trois livres et réalisée à partir de la seconde moitié du xive siècle. Le germe en serait le conflit chevalerie-royauté, possible écho de la crise qui marqua la dynastie des Trastamare. J. M. Cacho Blecua suggère que, dans cette version, Amadis aurait péri aux mains de son fils, tandis qu'Oriane se serait suicidée. Le récit comprendrait une partie des exploits d'Esplandian. Dans le même temps, le Portugais Vasco de Lobeira aurait composé ou traduit un Amadis aujourd'hui inconnu. c) Entre 1492 et 1506, Montalvo procède à la refonte de l'œuvre, peut-être à partir de deux versions différentes. Il procède à une nouvelle distribution de la matière en quatre livres, élimine, abrège ou amplifie, et glose à l'aide de nombreux procédés rhétoriques, accentuant le côté moralisateur du récit.

Mais là ne s'arrêta pas la lignée d'Amadis.

En 1514, apparut un Lisuarte de Grecia, récit des exploits du fils d'Esplandian et petit-fils d'Amadis. En 1526, le bachelier Juan Díaz, dans un second Lisuarte, dont le dénouement ne satisfit personne, eut le mauvais goût de faire mourir Amadis de vieillesse, tandis qu'Oriane devenait abbesse. C'est alors qu'apparut Feliciano de Silva, grand faiseur de romans en série, qui, pour la plus grande joie des lecteurs, entreprit de continuer le cycle d'Amadis. Ainsi parurent successivement Amadis de Grèce, dont le héros est l'arrière-petit-fils d'Amadis et qui eut le mérite de ressusciter le vieil aïeul, puis, en 1532, le Don Florisel de Niquea, histoire des exploits du fils d'Amadis de Grèce en quatre volumineuses parties.

En 1546, le Don Silves de la Selva, anonyme, que l'on peut considérer comme le douzième livre de cette série, mit un point final à ce cycle étonnant. Les lecteurs, lassés, pris par d'autres modes, ne prêtèrent guère attention aux derniers-nés de l'illustre lignée, les princes Espheramundi et Amadis de Astra. Et ce fut[...]

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Écrit par

  • : maître assistant, agrégée à l'université de Paris-X-Nanterre

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Média

<it>Don Quichotte et Sancho Pança</it>, A. Decamps - crédits :  Bridgeman Images

Don Quichotte et Sancho Pança, A. Decamps

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