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ROME ET EMPIRE ROMAIN L'artisanat sous l'Empire

L'artisanat artistique

La commande

Un commanditaire peut s'adresser à un artisan ou à un artiste en dirigeant plus ou moins son œuvre ; un texte du iie siècle nous fait assister ainsi à une discussion sur la construction de bains à partir de dessins sur parchemin présentés simultanément par plusieurs constructeurs et à une sorte d'examen des devis (Aulu Gelle, Nuits attiques, xix, 10) ; au contraire, lorsque Trimalcion dans le Satiricon de Pétrone passe commande de son tombeau, le programme iconographique est très contraignant mais la forme du monument, le style de la représentation ne sont pas précisés : « ... je te prie de représenter sur mon monument des navires voguant à pleines voiles, et moi-même siégeant sur une estrade, vêtu de la toge prétexte et portant cinq bagues, en train de distribuer au public des pièces que je prends dans un sac [...] et tu mettras aussi tout le peuple en train de s'empiffrer... » (paragr. 71) ; le texte est certes parodique mais il paraît bien rendre compte des rapports les plus fréquents entre artisan et commanditaire.

La copie et la transmission du répertoire

Il y avait peu de risques de voir les artisans romains abuser de leur liberté de créer : bien que des techniques nouvelles puissent s'introduire (par exemple dans la construction ou dans la céramique), en matière d'art, où la doctrine de l'imitation reste fondamentale, l'innovation n'est pas pour eux une valeur essentielle et la copie n'est pas déshonorante. Il peut s'agir de moulages complets comme dans la céramique sigillée ou en sculpture : un texte du iie siècle évoque ainsi un bel Hermès d'Athènes, « ce dieu de bronze, si bien dessiné, aux contours si harmonieux », mais qui est « rempli de poix car les statuaires en font tous les jours une empreinte » (Lucien, Jupiter tragique, 33) ; ou bien il peut s'agir de répétitions faites de mémoire, de petites adaptations de l'iconographie dans les arts figurés où il n'est pas, semble-t-il, nécessaire de retenir l'hypothèse de cahiers de modèles précis : l'artisan ou l'artiste qui voyage n'emporte que son savoir et quelques outils (Philostrate, Apollonios de Tyane, V, 21).

Le style et la qualité

Le pont du Gard - crédits : BasieB/ Getty Images

Le pont du Gard

Le producteur « romain » de représentations figurées peut s'inscrire dans plusieurs traditions esthétiques : celle de sa province particulière (par exemple les reliefs funéraires de Palmyre), ou bien celle du classicisme grec et du réalisme qui est dominante (par exemple la stèle du musée du Vatican, représentant un sculpteur), ou bien encore celle de l'Italie centrale, l'art dit « plébéien » expressif, moins académique et cultivé (comme sur la représentation des tailleurs de pierre d'Ostie) qui convient à la technique parfois sommaire des artisans. De façon générale, il ne faut pas s'exagérer la qualité de la production romaine : à côté de la remarquable architecture du pont du Gard, l'aqueduc d'Uzès à Nîmes présente des malfaçons grossières ; cette irrégularité est typique de la production artisanale. L'immense majorité des consommateurs romains devait s'en satisfaire sans problème.

— Roger HANOUNE

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Écrit par

  • : maître de conférences (archéologie romaine) à l'université de Lille-III-Charles-de-Gaulle

Classification

Média

Le pont du Gard - crédits : BasieB/ Getty Images

Le pont du Gard

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