ROME ET EMPIRE ROMAIN Le Haut-Empire
Le siècle des Antonins (96-192 apr. J.-C.)
Les souverains et les grands traits de leur politique
Nerva (96-98) était effacé, bien vu du Sénat, mais sa personnalité ne répondait pas aux vœux des armées, et à Rome même les prétoriens exigèrent par la force le châtiment des meurtriers de Domitien. Pour assurer son pouvoir et sa succession, Nerva, qui n'avait pas de fils (et avait été choisi pour cela), adopta et associa à l'Empire Trajan, le chef de l'armée du Rhin, qui était alors la plus puissante et venait sous ses ordres de remporter des succès sur les Germains. Peu après, Nerva mourut. Il avait eu le mérite de distinguer un général, dont la valeur était reconnue de tous, et ce « choix du meilleur », qui se reproduisit plusieurs fois au cours du siècle, facilité à vrai dire par l'absence de descendance naturelle chez les empereurs, devint un lieu commun de la propagande officielle : Tacite en donna la théorie à propos de l'adoption de Pison par Galba, en 69, et Pline le Jeune y consacra plusieurs pages du texte du Panégyrique de Trajan, qui avait été prononcé en 100.
Trajan
Trajan (98-117) était un soldat au tempérament autoritaire, qui se montra très respectueux du Sénat, mais sans sacrifier une parcelle de son autorité personnelle. Il gouverna en prince absolu, mais pour le bien public, ce qui donnait satisfaction à l'idéologie politique alors dominante (Dion de Pruse). Né en Espagne, à Italica, d'une famille italienne émigrée et « coloniale », il favorisa les provinciaux, sans négliger l'Italie : le système des alimenta (tables de Véléia et de Bénévent) pourvoyait à l'entretien de fils de familles pauvres, grâce au revenu de prêts à faible intérêt offerts aux propriétaires de la Péninsule. On ne sait si l'empereur cherchait d'abord à restaurer l'agriculture, ou plutôt à fournir à l'armée des recrues et des cadres d'origine italienne. Il développa aussi l'administration, introduisit dans les hauts postes de nouveaux chevaliers, des Orientaux notamment, et des Espagnols. Le Sénat se peupla aussi de provinciaux, mais ils durent placer en Italie le tiers au moins de leur fortune foncière. Grand travailleur et scrupuleux, Trajan surveilla de près les gouverneurs de province, fit condamner par le Sénat, agissant en Haute Cour, plusieurs proconsuls cruels ou corrompus, et orienta dans un esprit traditionaliste, parfois même réactionnaire, l'action de Pline le Jeune, envoyé en Bithynie (Lettres de Pline, X). Malheureusement, militaire dans l'âme et avide de gloire, il engagea les forces de l'Empire dans des guerres difficiles. Au vrai, les deux grandes campagnes dirigées (102-107) contre les Daces du roi Décébale, dangereux sous Domitien, eurent pour but d'assurer la sécurité de la frontière du Danube inférieur, jusque-là négligée. Longues et meurtrières, elles aboutirent à la formation, sur la rive barbare du fleuve, de la province nouvelle de Dacie. Les trésors de Décébale et les mines d'or des Carpates enrichirent le Trésor, financèrent les grandes constructions du règne (à Rome, le forum de Trajan, avec ses bibliothèques et la célèbre colonne Trajane et, à Ostie, un nouveau port) et les préparatifs de la guerre contre les Parthes. Depuis Néron (63), le traité de Rhandeia, en Cappadoce, obtenu à la suite des brillantes campagnes de Corbulon, avait donné à Rome la frontière de l'Euphrate et permis l'annexion de plusieurs États tampons (Cappadoce, Pont, Commagène) ; l' Arménie, longtemps disputée entre les deux puissances, parthe et romaine, reçut un roi arsacide, mais investi par Rome : Tiridate vint à Rome en 67 recevoir de Néron les insignes royaux. En 106, Trajan fit annexer l'Arabie, avec les villes caravanières de Pétra et de Bostra, et plaça Palmyre, plaque tournante des routes du[...]
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Écrit par
- Yann LE BOHEC : professeur à l'université de Grenoble
- Paul PETIT : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Grenoble
Classification
Médias
Autres références
-
CIVILISATION ROMAINE (notions de base)
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 4 295 mots
- 18 médias
Le destin de Rome est celui d’une obscure bourgade de la péninsule italienne devenue, en l’espace de quatre siècles, une mégapole, capitale d’un immense empire s’étendant de l’Écosse à l’Arabie, des confins sahariens aux rives du Danube. Ce processus historique s’accompagna de la disparition de la ...