ROME ET EMPIRE ROMAIN Le Haut-Empire
La dynastie des Sévères (193-235)
Septime Sévère
La mort de Commode ouvrit, comme autrefois celle de Néron, une crise grave. Les armées de province ne supportèrent pas la comédie que jouaient à Rome les prétoriens, qui après trois mois de règne tuèrent l'excellent Pertinax et donnèrent la pourpre à Didius Julianus, qui leur promettait davantage. L'armée du Danube marcha sur Rome et imposa son chef, Septime Sévère. Il dut se débarrasser de deux rivaux, en Orient Pescennius Niger, soutenu par la population et l'armée de Syrie, qui fut vaincu et tué en 194 ou 195, et en Occident Clodius Albinus, proclamé par l'armée de Bretagne et soutenu par la Gaule, battu et tué près de Lyon, qui fut terriblement ruinée (197). Septime Sévère avait engagé une brillante campagne en Mésopotamie et il imposa aux Parthes une paix avantageuse, qui donnait à Rome une province nouvelle, en haute Mésopotamie. Il passa à Rome les années 202 à 208, partit alors pour la Bretagne combattre les Barbares de Calédonie, et y mourut en 211. Né en Afrique, à Lepcis Magna (Tripolitaine), il appartenait à une famille romanisée, et il avait suivi une carrière sénatoriale régulière. Marié à Julia Domna, une Syrienne issue d'une famille sacerdotale d'Hémèse, dont le Baal était célèbre, il eut autour de lui un grand nombre d'Africains et de Syriens. Actif et ambitieux, attaché à sa famille, c'était un bon général, mais surtout un juriste et un administrateur. Il comprit mieux que les Antonins les besoins de l'Empire, les plaintes des provinciaux et des humbles qu'il voulut sincèrement soulager, d'autant plus qu'il détestait les sénateurs de Rome et les Italiens. Ses débuts difficiles, les pillages auxquels se livrent ses troupes, l'exécution de quelques dizaines de sénateurs et la confiscation massive des biens de ses ennemis, qui enrichissent sa caisse personnelle, la res privata, laissèrent une pénible impression ; l'influence qu'il laissa prendre à ses fidèles soldats danubiens contribua à militariser le régime. Le principat, d'essence libérale, issu des anciennes magistratures, fait place peu à peu au « dominat », monarchie dont le chef est le dominus, le maître de ses sujets. Septime Sévère fit de l' armée la pépinière de l'ordre équestre, en permettant au soldat illyrien, encore proche de la paysannerie, voire de la barbarie, d'accéder à de hauts postes. L'armée fut comblée : soldes augmentées, fréquence des donativa, nourriture et entretien gratuits, droit pour les sous-officiers de se réunir en collèges, pour les soldats mariés de vivre en ville hors du service. Les effectifs furent accrus de trois légions « parthiques », commandées par des chevaliers, et l'une d'elles fut cantonnée près de Rome. Les prétoriens, des Italiens en majorité, furent licenciés et de nouvelles cohortes, portées à 1 000 hommes, furent recrutées dans l'élite des légions danubiennes. Ainsi les sénateurs et les Italiens étaient durement frappés, d'autant plus que les provinces les plus importantes étaient souvent confiées à des chevaliers (par intérim). Tels sont les traits les plus marquants de la « révolution sévérienne », mal jugée par la tradition sénatoriale (Dion Cassius) et par certains modernes (Rostovtseff) qui estiment que Septime Sévère a préparé l'alliance des paysans et de l'armée contre les élites sociales, sénateurs et décurions, et parlent, non sans excès, de « lutte de classes ». La situation des villes s'aggravait : afin de nourrir les soldats, un impôt, l' annone militaire, payable en nature, fut organisé, promis à un long avenir, versé par les propriétaires fonciers, y compris ceux de l'Italie jusque-là exempts d'impôt ; cette annone fut levée par les sénats municipaux, dont les membres les plus riches (les dix plus riches en principe, ou [...]
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Écrit par
- Yann LE BOHEC : professeur à l'université de Grenoble
- Paul PETIT : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Grenoble
Classification
Médias
Autres références
-
CIVILISATION ROMAINE (notions de base)
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 4 295 mots
- 18 médias
Le destin de Rome est celui d’une obscure bourgade de la péninsule italienne devenue, en l’espace de quatre siècles, une mégapole, capitale d’un immense empire s’étendant de l’Écosse à l’Arabie, des confins sahariens aux rives du Danube. Ce processus historique s’accompagna de la disparition de la ...