ROME (JEUX OLYMPIQUES DE) [1960] Contexte, organisation, bilan
Du 13 au 18 juin 1955, Giulio Onesti, président du Comité olympique italien, et Salvatore Rebecchini, maire de Rome, se trouvent à Paris pour défendre devant le C.I.O., qui tient sa cinquantième session, la candidature de la Ville éternelle à l'organisation des jeux Olympiques d'été de 1960. Leur argumentation s'articule autour de trois axes forts : l'évocation de la grandeur de la Rome antique ; les relations privilégiées qui unirent l'Italie et le mouvement olympique dès la renaissance des Jeux ; l'entrée définitive du pays dans une modernité débarrassée de tout héritage fasciste.
Depuis toujours, les dirigeants du mouvement olympique sont fascinés par l'héritage antique, et ils reçoivent donc avec bienveillance le message romain. La figure tutélaire de Coubertin, qui soutint jadis avec ardeur le choix de Rome comme site des Jeux de 1908, est largement évoquée. Néanmoins, la réalité du passé olympique italien n'est pas aussi idyllique que ne l'indique Salvatore Rebecchini dans son discours : un seul Italien, Mario Lucchesi-Palli – et non pas deux comme il le prétend –, était présent au congrès fondateur de la Sorbonne en 1894 ; les Jeux de 1908 furent transférés d'urgence à Londres, car l'Italie ne se trouvait pas en mesure de les financer ; la candidature de Rome pour les Jeux de 1944 était motivée par la politique mussolinienne de glorification de la Grande Italie fasciste par les succès sportifs – le duce se servit abondamment pour sa propagande de la victoire de la Squadra Azzurra lors des Coupes du monde de football de 1934 et de 1938, et la magnificence hitlérienne déployée à l'occasion des Jeux de Berlin en 1936 l'impressionna. Enfin, Giulio Onesti sut convaincre les dirigeants politiques de la péninsule que le prestige des Jeux s'inscrivait parfaitement dans le processus de réinsertion internationale de l'Italie engagé dès la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les « cardinaux » sont séduits par les arguments, et Rome est élue ville d'accueil des XIVes jeux Olympiques d'été célébrant la XVIIe olympiade au troisième tour de scrutin, par trente-cinq voix contre vingt-quatre à Lausanne.
L'engagement de l'État, qui se matérialise par la nomination de Giulio Andreotti, ministre des Finances, à la tête du comité d'organisation, s'avère à la hauteur des ambitions : près de 60 milliards de lires sont dépensées pour les infrastructures, dont 26 milliards pour l'édification de l'aéroport international de Fiumicino, et la construction des enceintes sportives engloutit 16 milliards de lires ; par ailleurs, 20 milliards de lires sont consacrées à la création d'un réseau routier moderne et à la construction de ponts sur le Tibre.
Le Foro Italico, au nord de Rome, est choisi pour implanter le parc olympique, un vaste complexe de 220 000 mètres carrés, ce qui ne va pas sans poser problème : il fut édifié en 1927 – il était alors baptisé Foro Mussolini – et les éléments architecturaux célébrant le fascisme sont toujours en place ; néanmoins, la polémique demeure interne et ne connaît aucun écho sur le plan international. Rome n'avait de toute façon pas de choix alternatif, car le Stadio Olimpico, une enceinte de quatre-vingt-dix mille places conçue par Carlo Rocatelli et réalisée par Annibale Vitellozzi, fut inauguré en 1953, avant le vote du C.I.O. Le Stadio Olimpico accueille les compétitions d'athlétisme et est le théâtre des cérémonies d'ouverture et de clôture. Le Stade de marbre (Stadio dei Marmi), construit en 1936 par l'architecte Enrico Del Debbio et qui jouxte le Stadio Olimpico, est rénové : il peut recevoir quinze mille personnes, sert de terrain d'entraînement pour les athlètes, et les matchs de hockey sur gazon s'y déroulent ; sa ressemblance[...]
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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