ROME, VILLE OUVERTE, film de Roberto Rossellini
Fils de famille sans fortune, amateur de voitures, père de famille(s), Roberto Rossellini (1906-1977) est une figure inclassable dans les genres et les périodes du cinéma. Ses trois films de guerre : Le Navire blanc (La nave bianca, 1941), Un pilote revient (Un pilota ritorna, 1942), L'Homme à la croix (L'uomo dalla croce, 1942) ne sont pas plus des films fascistes que sa trilogie du lendemain de la guerre – Rome, ville ouverte (Roma, città aperta, 1945) ; Paisà, 1946 ; Allemagne année zéro (Germania anno zero, 1947) – ne constitue un cinéma de la résistance. Dans les uns et les autres, comme plus tard dans ses films avec Ingrid Bergman, il désire montrer la vie comme elle est, en prenant parti certes, mais un parti moral et personnel, jamais politique.
La réalisation, particulièrement opportuniste dans Rome à peine libérée, de ce premier film « de résistance » lui conféra une réelle aura. Sorti en Italie dès septembre 1945, le film eut un succès auquel n'était pas étrangère l'utilisation à contre-emploi d'Anna Magnani et d'Aldo Fabrizi, acteurs très populaires, mais spécialistes des rôles comiques. C'est le succès critique en France (y compris auprès des communistes, tels Georges Sadoul et Paul Eluard) qui permit à Rossellini d'échapper définitivement à l'étiquette de « fasciste ». Avec André Bazin et Jacques Rivette, une critique catholique et « phénoménologique » devait un peu plus tard trouver chez Rossellini son cinéma idéal.
Celui qui croyait au ciel, et celui qui n'y croyait pas
Rome, début 1944, sous l'occupation allemande. Un responsable de la résistance communiste, Manfredi, vient d'échapper à une perquisition. Il se réfugie chez une camarade de son amie Marina, une danseuse de cabaret. Il fait la connaissance de Pina, une jeune femme du peuple, dont le fiancé Francesco, typographe, est également communiste et résistant. Le chef de la Gestapo, Bergmann, recherche activement Manfredi, et compte pour le retrouver sur l'aide de Marina, laquelle, toxicomane, est sous la coupe de la redoutable Ingrid, l'acolyte de Bergmann. Celui-ci organise une rafle dans l'immeuble de Pina ; Manfredi s'échappe, mais Francesco est arrêté, et Pina tuée par les Allemands. Les partisans libèrent les prisonniers ; Francesco et Manfredi vont loger chez Marina, mais elle les dénonce. Arrêté avec don Pietro, le curé qui aidait les résistants, Manfredi est torturé ; il meurt sans rien révéler ; don Pietro est fusillé. Le fils de Pina reste seul avec Francesco.
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Écrit par
- Jacques AUMONT : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle, directeur d'études, École des hautes études en sciences sociales
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