LUXEMBURG ROSA (1870-1919)
Née près de Lublin, en Pologne sous domination russe, Rosa Luxemburg est issue d'une famille de commerçants juifs de tradition libérale.
Après des études au lycée de Varsovie, elle entre dès 1887 en relation avec des militants socialistes polonais. Obligée de passer à l'étranger à cause de son activité politique, elle s'installe à Zurich, où elle étudie l'économie politique et devient marxiste. Avec son compagnon Leo Jogiches, elle participe en 1893 à la fondation du Parti social-démocrate du royaume de Pologne, qu'elle représente au congrès de Londres de la IIe Internationale (1896).
Deux années plus tard, elle contracte un mariage blanc avec un médecin allemand afin de pouvoir militer dans le Reich, et s'inscrit au Parti social-démocrate (S.P.D.). Elle s'impose comme une des figures de proue de l'aile gauche du parti, et dirige la contre-attaque contre les thèses révisionnistes d'Eduard Bernstein ; elle soumet, dans sa brochure Réforme ou Révolution (1889), le réformisme de Bernstein à une critique acérée, s'attaquant en particulier au parlementarisme qu'il préconisait. Brillante journaliste, elle assure la rédaction en chef du quotidien Sächsische Arbeiterzeitung et collabore à plusieurs publications sociales-démocrates, dont Die neue Zeit, la revue théorique dirigée par Kautsky. Oratrice très demandée, elle parcourt l'Allemagne au gré des meetings et des campagnes du parti.
Mais cette activité au sein du S.P.D. ne l'a jamais détournée des affaires polonaises. En décembre 1905, elle gagne clandestinement Varsovie en révolution. Elle propose aux militants une compréhension globale du mouvement et fixe dans ses brochures les buts immédiats à atteindre : contrecarrer l'orientation putschiste des courants nationalistes et étendre la révolte contre le tsarisme à la paysannerie et à l'armée. Emprisonnée en mars 1906, elle est libérée en juillet et peut quitter Varsovie. Elle rédige alors Grèves de masses, parti et syndicats, dans lequel elle tire pour la classe ouvrière allemande les enseignements de la révolution russe et polonaise.
Sa conception de la grève politique et le mot d'ordre central qu'elle préconise pour l'Allemagne — « la république » — entraîne en 1910 sa rupture avec Kautsky et la majorité de gauche du S.P.D. C'est aussi vers cette époque qu'elle se lance dans une campagne de dénonciation du militarisme allemand et qu'elle se lie avec Karl Liebknecht. En août 1914, après le vote des crédits de guerre par les députés sociaux-démocrates, elle connaît un moment de désespoir. Mais bientôt une réunion des opposants internationalistes se tient à son domicile. Arrêtée en février 1915, puis de nouveau en juillet 1916 (par « mesure de protection »), elle ne sera libérée que par la révolution. Aussi est-ce depuis sa prison qu'elle fait parvenir la brochure La Crise de la social-démocratie (mars 1916), signée Junius, et ses contributions aux Lettres de Spartakus, voix de l'opposition révolutionnaire de la social-démocratie.
À sa sortie de la forteresse de Breslau (9 nov. 1918), son premier geste est de tenir un meeting sur la place de la ville. Pendant les deux mois qui lui restent à vivre, cette femme va se dépenser sans compter, « comme une chandelle qui brûle aux deux bouts », à la tête de la ligue Spartakus, puis du Parti communiste allemand, fondé en janvier 1919. Lucide sur la difficulté de mener à terme la révolution socialiste, elle compte sur le développement du mouvement de grèves pour arracher les masses à l'influence des dirigeants sociaux-démocrates. Mais la droite décide de passer à la contre-offensive. En riposte à une mesure provocatrice du gouvernement, les ouvriers de Berlin déclenchent, le 6 janvier, l'insurrection. Opposée à celle-ci, Rosa Luxemburg comprend[...]
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Écrit par
- Jean-Claude KLEIN : diplômé de l'École pratique des hautes études, chargé de cours à l'U.F.R. de musique et musicologie de l'université de Paris-IV-Sorbonne
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