ROUTES DE LA SOIE
Mentionnée pour la première fois dans un ouvrage d’un géographe allemand du xixe siècle, Ferdinand von Richthofen, la « Route de la soie » n’a jamais été connue sous ce nom par les marchands qui la parcouraient. Peut-être ne savaient-ils même pas que les pistes qu’ils empruntaient faisaient partie d’une route fabuleuse, véritable pont entre l’Orient et l’Occident pendant près d’un millénaire, permettant l’échange de produits prestigieux et d’idées nouvelles.
Histoire de la Route de la soie
L’histoire de la Route de la soie n’est pas linéaire. Elle connut deux grandes périodes, pendant lesquelles les échanges furent intenses, entrecoupés de longs siècles de déclin.
La formation progressive du trajet
Les premiers linéaments de ce qui allait devenir la Route de la soie apparurent au Moyen-Orient, en Mésopotamie et en Perse. Dans ces contrées au relief peu accidenté, la formation de puissants royaumes (sumérien, babylonien, achéménide) favorisa l’apparition précoce de marchands itinérants qui établirent les premières voies commerciales à longue distance. Au cours de ses conquêtes, Alexandre le Grand (356-323 av. J.-C.) fonda plusieurs cités qui servirent ensuite d’étapes sur la Route de la soie.
C’est sous la dynastie des Han (206 av. J.-C.- 220 apr. J.-C.) que fut ouverte la Route de la soie. Le commerce de la soie était alors interdit hors de Chine et les contrevenants risquaient la peine de mort. Mais, malgré la Grande Muraille, les « barbares du Nord » harcelaient les frontières de l’Empire. La menace était telle que l’empereur Wudi (140-87 av. J.-C.) envoya Zhang Qian en mission vers l’ouest pour conclure une alliance avec les Yuezhi. Il ne revint que treize ans plus tard. S’il avait échoué à s’allier les Yuezhi, il rapportait de nombreux renseignements sur des peuples (Parthes, Sogdiens, Bactriens), des produits et des itinéraires jusqu’alors inconnus. Surtout, il avait découvert l’existence d’une race de chevaux dits « célestes », dans la plaine de Fergana, qui pouvaient servir les desseins militaires des Chinois. C’est pour les obtenir que l’empereur envoya, sous bonne escorte, des caravanes chargées de soie. Zhang Qian est ainsi considéré comme le « père fondateur de la Route de la soie ».
Les Parthes, rencontrés par Zhang Qian, devinrent les intermédiaires entre la Chine et Rome. L’Empire romain découvrit peut-être la soie lors de la défaite de sept légions contre l’armée parthe dont les étendards flamboyants avaient marqué la mémoire des vaincus. La soie connut un tel succès à Rome que le Sénat adopta des lois somptuaires contre l’usage de cette étoffe qui laissait les femmes nues et vidait les caisses de la République. En effet, le trajet était si long, les intermédiaires si nombreux que, arrivée à Rome, la soie valait son poids en or. Les Romains ignoraient tout de l’origine de la soie et ils croyaient que c’était une sorte de laine produite par un arbre mystérieux qui poussait au pays des Sères (Sericus en latin, de soie).
Les rythmes de la route
Les échanges sur la Route de la soie déclinèrent une première fois au iiie siècle, avec la chute des Han. Le commerce ne se ranima pas avant l’essor de la Chine des Tang au viie siècle. La conquête musulmane des Empires byzantin et sassanide vers 650 entraîna cependant des bouleversements et désorganisa les réseaux commerciaux. Les armées musulmanes attaquèrent également les royaumes bouddhiques et leur art figuratif. Le déclin des Tang, vers 750, signa la disparition en Asie centrale de la présence bouddhiste sur la Route de la soie. Monastères et temples furent abandonnés. De plus, l’assèchement progressif des glaciers qui alimentaient en eau les villes et les oasis aggrava la situation.
La Route de la soie connut un second âge d’or sous l’Empire mongol, au xiiie siècle. La pax mongolica (la paix mongole)[...]
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