RUHR
Rivière de 235 kilomètres de longueur, affluent de la rive droite du Rhin, dans lequel elle se jette à Duisburg. La Ruhr a donné son nom au plus puissant bassin industriel du monde (Ruhrgebiet). Les besoins en eau des villes et des usines de celui-ci ont entraîné l'établissement de barrages-réservoirs dans son cours amont, dans le Sauerland : barrage de la Bigge (140 millions de mètres cubes) et barrage de la Möhne (135 millions de mètres cubes) sur son affluent.
Né au xixe siècle de l'extraction du charbon, le bassin de la Ruhr a été l'arsenal des tentatives d'hégémonie économique et militaire de l'Allemagne. Tout comme le nom de la dynastie industrielle des Krupp, la Ruhr constitue un symbole universellement connu.
Il y a d'abord, à l'origine des puits, des usines et des villes, un bassin charbonnier qui affleurait sur les marges du massif ancien du Sauerland, et notamment sur les flancs raides de la vallée de la Ruhr, et qui plonge vers le nord sous la couverture sédimentaire crétacée du bassin de Münster. À l'exploitation artisanale de la vallée de la Ruhr a succédé, à partir de 1837, date du premier puits dans la région d'Essen, une exploitation souterraine à grande échelle. Sous l'Emscher le charbon est à 700 mètres et, sous la Lippe, à plus de 1 000 mètres de profondeur. Cette profondeur constitue un élément déterminant dans l'établissement du calcul des réserves et un frein à la progression vers le nord. Elle explique aussi le déplacement historique de l'extraction et en même temps l'évolution des modalités de l'exploitation : les impératifs techniques ont encouragé la concentration économique. En même temps, l'amélioration du matériel et de la productivité, et le recours aux services techniques, commerciaux, administratifs et sociaux préexistants de la région sud ont fait que le peuplement minier de la zone nord pouvait être moins dense et plus exclusivement voué à l'extraction.
À la zonation des paysages industriels s'est ajoutée la zonation des variétés de charbon, maigres au sud, gras et cokéfiables entre la Ruhr et l'Emscher, flambants et de ce fait utilisés par la carbochimie au nord. Les premiers furent utiles au puddlage et alimentent les foyers domestiques. Cette vocation et le rapide épuisement des réserves font que l'extraction a laissé peu de traces dans la zone de la Ruhr : aujourd'hui la vallée verdoyante est un lieu d'implantations tertiaires et de loisirs. Une seconde zone, entre Ruhr et Emscher, la zone du Hellweg, constitue la zone la plus urbanisée avec les villes de plus de 500 000 habitants de Duisburg, Essen, Dortmund, etc., parce que le charbon cokéfiable a permis le développement d'un énorme potentiel sidérurgique et parce que depuis le xixe siècle charbon et acier ont provoqué un phénomène d'accumulation industrielle, y compris l'installation d'industries de conversion, telles les usines d'automobiles à Bochum. Il y a là un authentique paysage urbain.
Les rives de l'Emscher, rivière utilisée comme affluent et doublée du canal Rhin-Herne, ont concentré un peu plus au nord les cokeries et toutes les industries des sous-produits de la cokéfaction, carbochimie relayée par le raffinage pétrolier et la pétrochimie.
La Ruhr, un des foyers industriels les plus puissants, est caractérisée par la primauté des industries de produits de base : fourniture d'énergie sous toutes ses formes, sidérurgie et chimie. La production de charbon, qui put être portée à 114 millions de tonnes dès 1913 et à 130 millions de tonnes en 1939, était tombée à 56 millions en 1989 sous l'effet de la concurrence du pétrole.
La sidérurgie est aujourd'hui le fondement majeur de toute l'activité de la Ruhr. Elle tend à se regrouper de plus en plus sur le Rhin, par où arrive[...]
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Écrit par
- Pierre RIQUET : maître assistant à l'université de Paris-I
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