RYTHME, musique
Rythme généralisé
Données de la perception
En constatant que la perception d'un rythme peut être liée non à une différenciation des durées et de leur espacement, mais à une accentuation de certains éléments par rapport à d'autres, on situe un point de rencontre entre rythme et intensité. En réalité, les différents paramètres musicaux sont profondément interdépendants les uns des autres, et leur perception résulte d'un phénomène complexe : l'écoute, avec toutes ses implications physiologiques et psychologiques. Les événements sonores s'inscrivent dans le temps ; quelques données, réunies par des acousticiens (Haas, Winckel), sur le fonctionnement de l'oreille illustrent la relation des durées avec les autres paramètres. Si la durée d'un son isolé est inférieure à cinq millisecondes, l'oreille ne distingue aucun caractère de hauteur. Si deux sons, pas trop dissemblables, se succèdent à moins de cinquante millisecondes, l'oreille n'en perçoit qu'un (limite du pouvoir séparateur). D'autres corrélations apparaissent dans les expériences citées par Pierre Schaeffer ; si l'on prend un phénomène sonore discontinu tel que la succession régulière de percussions sèches, sans résonance, on retrouve le battement isochrone qui a été décrit comme un jalonnement élémentaire du temps musical ; si cette séquence est accélérée, son déroulement resserré dans le temps va donner non plus une succession d'événements sonores, mais un son continu présentant une forte granulation ; en continuant l'accélération, on obtient la perception d'une hauteur. Ainsi, selon la rapidité de succession de ses composantes, une même séquence changera de caractéristique dominante, cette dernière se déplaçant du domaine de l'espacement des durées à celui du timbre, pour atteindre enfin celui des hauteurs définies. Une autre expérience porte sur l'écoute de fragments de son de trompette ; à trois millisecondes, on entend un « top » sans hauteur, timbre ou durée définis ; si le niveau d'écoute est bas, le top devient inaudible, alors qu'à niveau égal le son complet reste audible : l'intensité perçue d'un son augmente en même temps que sa durée, pour se stabiliser lorsque la durée dépasse cent à cent cinquante millisecondes. Un autre exemple illustre particulièrement bien l'interdépendance qui existe entre la durée perçue d'un événement sonore, sa forme et sa densité d'information ; un son a été constitué avec un grincement entretenu (un quart de seconde), suivi d'une résonance (trois secondes) ; les durées de la phase d'entretien et de la phase de résonance ont été généralement jugées équivalentes à l'écoute, ce qui montre que l'oreille les a appréciées non en fonction d'un temps métrique, objectif, mais bien par rapport à l'importance de l'événement sonore, la phase entretenue étant plus riche en information que la résonance dont l'extinction est régulière et prévisible.
Des exemples de ce décalage entre temps effectif et temps perçu sont faciles à constituer avec les instruments classiques de l'orchestre, et prouvent que la perception des durées est liée à celle des timbres et des hauteurs ; une ronde durant dix secondes sera évaluée différemment selon qu'elle est réalisée par une tenue fixe des cordes, donc par un son entretenu qui se continue à peu près identique à lui-même, ou par un cluster au piano, qui comporte à l'intérieur des dix secondes attaque percussive et résonance, deux types de son différents. Ce dernier cas varie selon que le cluster est grave ou aigu, la résonance étant forte et prolongée dans le grave (jusqu'à trente secondes environ, le temps variant beaucoup selon les instruments), et faible et courte dans l'aigu (guère plus de dix secondes). Dans le[...]
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Écrit par
- Nicole LACHARTRE : compositeur, fondatrice et directrice artistique de l'Association pour la collaboration des interprètes et compositeurs
Classification
Médias
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