SA‘DI (1213?-1291)
Une œuvre abondante et polymorphe
L'œuvre de Sa‘di, rassemblée un demi-siècle après sa mort par le compilateur Mohamed Abu Bakr de Bisoutoun, se compose en grande partie de recueils de poésies, d'une demi-douzaine de traités en prose (risāleh) et de deux ouvrages de morale intitulés le Boustān (Le Verger), en vers, et le Gulistān (Le Jardin des roses), en prose mêlée de vers, auxquels l'auteur doit sa réputation. Parmi les douze recueils de poésies dont l'ensemble constitue le Divān du poète, les plus importants sont les Qasidah (odes longues) en vers arabes, les Qasidah en vers persans et les Molamma‘āt (Les Étincelles), poèmes où alternent vers arabes et persans. Les quatre recueils de ghazal (odes courtes) – dont les Khawātīm (Les Bagues) qui ont une très grande valeur du double point de vue de la pensée et de l'expression –, un livre de préceptes et de conseils intitulé Sāhibiyya, les Moqatta‘āt (Les Fragments) et les Rubaiyyāt (Les Quatrains) forment la partie la plus notable de l'œuvre poétique de Sa‘di. Il faut mentionner aussi les Mutāyabāt ou les Hazliyāt (Les Facéties), enregistrées dans certains manuscrits sous le titre de Khabithāt (Les Turpitudes), pièces pour la plupart monotones, dépourvues de toute originalité artistique et composées selon l'auteur à la demande d'un gouverneur. Le genre lyrique ( ghazal) est celui dans lequel le poète a montré son talent et sa maîtrise. Sans jeux de mots excessifs et sans paraboles ennuyeuses, si abondants dans l'œuvre des grands auteurs classiques persans, les ghazal de Sa‘di sont l'expression fidèle et spontanée de ses sentiments et de ses expériences. C'est grâce à l'œuvre de Sa‘di que ce genre a pris son essor avant d'atteindre, un demi-siècle plus tard, à la perfection avec Hāfiz.
Sa‘di est considéré avant tout comme un moraliste, et il ne doit son immense succès qu'à ses deux ouvrages didactiques. Ayant rassemblé l'essentiel des matériaux de ces livres au cours de ses voyages, il publie le Boustān en 1257 (655 de l'hégire) et le Gulistān l'année suivante. Le premier est dédié à Atābak Muzaffar od-Din Abu Bakr ibn Sa‘d Zangui, le second à son fils Sa‘d ibn Abu Bakr ibn Sa‘d Zangui de qui Sa‘di a pris son nom de plume. Ce sont des livres de morale dans lesquels l'auteur expose ses idées sous forme d'apologues émaillés d'une foule de proverbes et de sentences, dans un style à la fois simple et éloquent. Les souvenirs et les impressions de voyages (plus ou moins authentiques) constituent la toile de fond de ces ouvrages.
Le Boustān est un mathnavi en dix chapitres, qui traitent respectivement : de la justice et de l'art de gouverner ; de la bienfaisance ; de l'amour et de l'enthousiasme ; de l'humilité ; de la résignation ; de la modération ; du domaine de l'éducation ; de la reconnaissance envers Dieu ; du remords et du repentir ; le chapitre x comprend des prières et la conclusion du livre.
Le Gulistān est de même inspiration et se divise en huit chapitres, qui ont pour titres : du caractère et de la conduite des rois ; des mœurs des derviches ; de la supériorité de la modération ; des avantages du silence ; de l'amour et de la jeunesse ; de la faiblesse et de la vieillesse ; de l'effet de l'éducation ; des règles de la société. Le Gulistān fit l'objet de maintes imitations au cours des siècles, dont les plus célèbres sont le Bahāristān (Le Jardin printanier) de Djāmi, écrit en 1487 (hég. 892), et le Kitāb-i-Parishān (Le Pêle-mêle) de Qā‘āni, publié en 1836 (hég. 1252).
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Mohammad Hassan REZVANIAN : docteur d'État ès lettres, professeur de littérature comparée aux universités de Téhéran, traducteur-expert auprès de la cour d'appel de Paris
Classification
Autres références
-
LYRISME
- Écrit par Jamel Eddine BENCHEIKH , Jean-Pierre DIÉNY , Jean-Michel MAULPOIX , Vincent MONTEIL et René SIEFFERT
- 10 725 mots
- 2 médias
Pourtant, la gloire d'Omar Khayyâm est surtout étrangère. Les Iraniens lui préfèrent, presque toujours, Saadi, Attâr ou Hâfez. Saadi, qui vécut au xiie siècle, est très souvent cité, encore aujourd'hui. Que de fois, dans les rues, entre 1950 et 1952, ai-je entendu dire, selon les circonstances,...