SAHUL
La Nouvelle-Guinée
On peut supposer que la préhistoire de la Nouvelle-Guinée est aussi ancienne que celle de l'Australie et peut-être plus, si les premiers colons de Sahul sont venus par le nord-est de la Wallacéa. Malheureusement, cette préhistoire ancienne reste des plus mal connues, et cela pour deux raisons. D'une part, l'installation des colons a dû s'effectuer dans la zone sahulienne submergée depuis la fin du Würm par la mer d'Arafoura ; en outre, l'immense plaine du sud de la Nouvelle-Guinée s'est légèrement effondrée depuis le Würm, ennoyant les plus anciens sites sous des zones marécageuses et, en particulier, en Nouvelle-Guinée occidentale. D'autre part, les recherches préhistoriques dans cette région sont très récentes, peu nombreuses, et elles ne concernent encore que les basses terres du golfe de Papouasie et l'ouest de la chaîne centrale. Hormis un site découvert dans la presqu'île de Huon et daté de 45 000 ans, c'est ici que, paradoxalement, furent mis au jour les sites les plus anciens que nous connaissions aujourd'hui et qui sont datés de 25 000 B.P. environ. Il s'agit seulement d'abris sous roche pour des haltes temporaires, et non de sites d'habitations. Ils ne peuvent donc nous renseigner pleinement sur la culture matérielle de leurs anciens occupants. On sait seulement que ceux-ci vivaient surtout de la chasse (oiseaux, marsupiaux) et de la cueillette de noix diverses et de fruits d'une espèce montagnarde de pandanus. L'outillage est peu ou prou semblable à ce que l'on rencontre, pour la même époque, en Australie ou en Asie du Sud-Est : éclats plus ou moins retouchés, lames à échancrures latéro-mésiales et lames à tranchant poli. Les différences tiennent probablement à une adaptation au milieu particulier des hautes terres néo-guinéennes, couvertes de neige, pendant les glaciations, jusqu'à une altitude d'environ 3 500 mètres. Les sites aujourd'hui submergés, plus anciens de plusieurs millénaires, offriraient probablement plus de ressemblance avec l'outillage australien de la même époque. Entre 12500 et 6600 avant notre ère, le climat commence à se réchauffer et les glaciers à fondre sous l'effet des pluies chaudes qu'ils reçoivent. C'est au cours de cette période que l'homme déboise intensément les forêts, comme les analyses polliniques l'ont montré, et qu'il devient protohorticulteur. À Kuk (près du mont Hagen), ont été mis au jour des systèmes de drainage, probablement pour la culture du taro. Dans la même région, la semi-domestication du porc est contemporaine de ces activités horticoles, activités qui concernent également les petites îles mélanésiennes proches de la Nouvelle-Guinée. Vers la fin de cette période, les sites montagneux témoignent des relations alors entretenues avec les régions côtières : présence de coquillages marins dans les parures, lames d'herminettes polies et de section elliptique ou biconvexe.
Vers 5 700-5 600 B.P., l'usage de la poterie apparaît sur la côte nord de la grande île, soit plus de 2 000 ans avant celle de la célèbre poterie « Lapita » dans l'archipel Bismarck. Ici, des nouveautés apparaissent dans la culture matérielle (outillage, parures, etc.). Certains de ces éléments, échangés de proche en proche, se retrouvent dans les Highlands. Ces circuits d'échanges, qui existèrent jusqu'à nos jours, permirent, à la fin du xvie siècle, l'introduction de la patate douce dans les régions intérieures : par ses qualités végétatives, cette plante apportée de Polynésie, probablement par les Espagnols, assura la colonisation de nouvelles terres en altitude. Ces circuits favorisèrent enfin, à une époque toute récente, l'introduction du fer : c'est ainsi que les lames de ressorts de camion, affûtées à une extrémité,[...]
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Écrit par
- José GARANGER : professeur émérite à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
Classification
Média