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SAINT-AMANT MARC ANTOINE GIRARD DE (1594-1661)

Antoine Girard, dont le nom se gonflera peu à peu, naît à Quevilly près Rouen, dans une famille de marins. Son frère courra l'aventure à Java. Son père a navigué, puis est devenu armateur et possède des intérêts commerciaux dans une fabrique de verre. Il professe le protestantisme. Saint-Amant se flatte de n'avoir pas appris les langues anciennes. Il sait du moins l'italien, l'espagnol, l'anglais, s'intéresse aux sciences et à la philosophie, a des connaissances en peinture et en musique et jouira d'une belle réputation de joueur de luth. Dès son adolescence, on l'embarque, probablement sur un navire négrier faisant le commerce triangulaire. Il touche les côtes d'Afrique noire, les Canaries, qu'il chantera dans un sonnet, les Indes occidentales (mais on doute qu'il ait voyagé aux Indes orientales comme ses propos le laisseraient croire). Vers 1619, il s'installe à Paris et se lie à des poètes soucieux comme lui de modernité et de libre inspiration, Théophile, Boisrobert, ainsi d'ailleurs qu'au malherbien Faret. Il publie sa Solitude qui est très remarquée. Il fréquente autant les salons, dont l'hôtel de Rambouillet, que les cabarets, dont il parle plus volontiers dans ses vers. Il a pour protecteurs et amis les Retz, qui l'emmènent en séjour à Belle-Isle. Il devient un des membres de la joyeuse coterie du comte d'Harcourt, la « confrérie des monosyllabes » (Harcourt : le Rond ; Saint-Amant : le Gros ; Faret : le Vieux...). Il se convertit au catholicisme (1625), qu'il pratique d'abord sans conviction. Plus tard, il est admis dans le milieu dévot de l'hôtel de Liancourt. À partir de 1634, il fait partie de l'Académie. Ses œuvres (1629, 1631, 1643...) subissent l'influence de Marino et de Gongora, mais jettent aussi les germes du burlesque.

En 1631, il recommence à voyager : Angleterre (1631, avec son protecteur Bassompierre, et 1644) ; Rome (1633) ; l'expédition navale du comte d'Harcourt contre les îles de Lérins, par Gibraltar et la Sardaigne (1636-1637) ; la Pologne, dont la reine l'a nommé secrétaire de ses commandements, et où « Saint-Amansky » se rend par la Hollande et l'Allemagne pour revenir par la Suède (1649-1651). De ces voyages, il rapporte des poèmes satiriques, Rome ridicule, Le Passage de Gibraltar, Albion. Redevenu sédentaire, il publie en 1653 le Moïse sauvé. Habitué des routes, des navires, des camps, des ambassades, des ruelles, des cabarets, c'est une des personnalités les plus vivantes du xviie siècle.

Victime des brocards de Boileau sur son mauvais goût, et de la réputation abusive de goinfre débraillé qu'il s'est plaisamment forgée, il doit, malgré la sympathie de Théophile Gautier, attendre que la vogue récente du baroque — ce baroque qu'illustre bien sa poésie descriptive, fantastique, fantaisiste, toujours imagée et musicale — lui fasse recouvrer sa vraie dimension : celle d'un grand poète.

— Jean MARMIER

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Rennes-II-Haute-Bretagne

Classification

Autres références

  • FRANÇAISE LITTÉRATURE, XVIIe s.

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    • 7 270 mots
    • 3 médias
    ...d’un mysticisme exacerbé (Chassignet) ou d’une foi militante (d’Aubigné) colorent la sensibilité de chacun diversement et parfois conjointement : le même poète peut se montrer tour à tour dévot et licencieux, austère et obscène. C’est le cas d‘Auvray, de Motin ou de François Maynard.