SAINT-ESPRIT
Du Moyen Âge à l'époque contemporaine
On peut ramener à trois les directions dans lesquelles, de l'époque médiévale à nos jours, s'est poursuivie et approfondie, en rapport avec la vie des croyants et des Églises, la réflexion sur l'Esprit saint (techniquement, la « pneumatologie »).
Il faut tout d'abord faire état – c'est l'évidence, après ce qui a été dit ci-dessus sur la fin de l'époque patristique – d'une direction proprement trinitaire (qui a une incidence œcuménique immédiate, d'ailleurs). Dès lors que le patriarche grec Photius († 1078) a fait de la procession à partir du Père seul le dogme principal de l'Église grecque comme telle, il était clair que des divergences tenues pour proprement dogmatiques venaient appuyer les motivations de politique ecclésiastique, jusqu'alors officiellement seules en cause, pour justifier et aggraver la séparation entre les Églises orientales et l'Église de Rome. Des conciles « d'union » (2e concile de Lyon en 1274 et concile de Florence en 1439) aux retrouvailles de Paul VI et Athénagoras (1967) en passant par telle bulle de Benoît XIV (1742), les tentatives n'ont pas manqué dans l'histoire pour faciliter une réconciliation des points de vue. Pour l'heure, un assez large consensus tend à se dégager, chez les théologiens d'Occident du moins, pour considérer que, si les approches sont différentes, elles ne conduisent pas à des divergences fondamentales concernant la foi qui est en cause, à savoir le mystère même du Dieu Un et Trois : « Nous pensons que les deux Églises-sœurs vivent de la même foi, voire que c'est la même Église en deux sections différentes, historiquement, culturellement et canoniquement désunies ; elles ont construit autrement le mystère de la sainte Trinité, à partir de perceptions et de catégories différentes, face à des erreurs et des problèmes qui n'étaient pas exactement les mêmes. » Tel est l'avis de l'éminent spécialiste qu'est en la matière Y. Congar, lequel ajoute cependant : « Il y a encore du travail historique, théologique et juridique pour aboutir à une synthèse entièrement vraie. » (La Parole et le souffle).
Une deuxième direction mérite d'être mentionnée. Elle a trait aux rapports du Saint-Esprit avec la grâce, et elle a donc un aspect anthropologique marqué. Pierre Lombard († 1160) ayant prétendu identifier purement et simplement l'Esprit saint et la grâce vue comme la vie même de Dieu communiquée à l'homme, il s'ensuivit des controverses qui traversèrent toute la théologie médiévale et classique (saint Thomas, D. Petau, L. Thomassin, T. de Régnon, J. M. Scheeben). L'intérêt fut ici le suivant : on fut bon gré mal gré forcé de réfléchir sur ce rapport de Dieu aux hommes – grâce, alliance, salut, divinisation, etc. – que la théologie contemporaine tend à comprendre précisément comme une « autocommunication de Dieu ». En une époque où les philosophies (de Kant et Hegel à Feuerbach et Marx ou Nietzsche) et les sciences humaines (de Freud aux structuralistes) reposent radicalement les questions de la transcendance, du surnaturel, etc., la théologie qui accepte de recevoir la contestation de la modernité se voit ouvrir un large champ de réflexion. Conduite, dans ce contexte, à élaborer de concert les catégories de gratuité et d'altérité, elle ne manque pas de faire place à Celui que toute la tradition présente justement, en Dieu et « hors de » lui, comme le lien et le lieu de la communication.
Une troisième dimension encore est à signaler, qui est ecclésiologique et qui a une incidence directement christologique (ce qui lui donne par là, une toute particulière importance). On sait que Joachim de Flore († 1202) a imaginé qu'un âge du Paraclet succéderait à l'âge[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Joseph DORÉ : théologien, docteur en théologie, doyen de la faculté de théologie de l'Institut catholique de Paris
- Richard GOULET : docteur de troisième cycle, chargé de recherche au C.N.R.S.
Classification
Autres références
-
ÂME
- Écrit par Pierre CLAIR et Henri Dominique SAFFREY
- 6 020 mots
...ruah) pour que l'homme soit rempli de vie divine. Cette possession de l'homme par le ευ̃μα commence dès cette vie mortelle par le don du Saint-Esprit(Romains, v, 5), mais n'obtient son plein effet qu'après la mort. Aussi le christianisme conçoit-il l'immortalité dans la restauration intégrale... -
ANASTASE LE BIBLIOTHÉCAIRE (810 env.-env. 880)
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 455 mots
Linguiste distingué et cardinal de Rome né autour de 810, probablement à Rome (Italie), mort vers 880, Anastase le bibliothécaire est un conseiller politique influent des papes du ixe siècle.
Apparenté à un évêque italien et reconnu pour sa parfaite connaissance du grec, Anastase est nommé cardinal-prêtre...
-
ANNONCIATION
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 168 mots
- 1 média
Solennité des Églises chrétiennes, l’Annonciation commémore, le 25 mars, l’événement relaté par l’Évangile de Luc (chap. i, 26-38), moment où l’archange Gabriel annonce à la Vierge Marie qu’elle concevra un fils de l’ Esprit saint et qu’elle l’appellera Jésus.
-
APÔTRES ACTES DES
- Écrit par André PAUL
- 844 mots
Second tome d'une œuvre unique, attribuée à Luc, dont le premier est le troisième Évangile canonique. Les articulations entre les deux livres sont nombreuses. L'un et l'autre débutent par un prologue à l'adresse d'un même personnage, Théophile : manière hellénistique de composer l'histoire qu'accompagne...
- Afficher les 27 références