LOUIS IX ou SAINT LOUIS (1214-1270) roi de France (1226-1270)
Le roi de France et la chrétienté
Dès le début de son règne personnel, Saint Louis manifesta une fermeté et une sagesse qui le firent respecter en Europe, au point que ses refus et ses échecs eux-mêmes servirent sa réputation. Il refusa pour ses frères la couronne d'Allemagne (1240) et celle de Sicile (1253). Il tenta de mettre fin à l'hostilité de Frédéric II envers Innocent IV. Plus tard, pris comme arbitre par Henri III et ses barons, il prononça en faveur du roi le « dit » d'Amiens (1264), que les barons anglais n'acceptèrent pas ; deux fois croisé, il aboutit à deux échecs flagrants. Et, pourtant, il reste pour la postérité le roi croisé, et les barons anglais en appelèrent derechef à l'arbitrage de ses conseillers. Il fit céder plusieurs fois Frédéric II et protégea le pape sans adhérer pour autant à la politique guelfe, il assainit les relations de la France et de l'Aragon sans abandonner l'alliance castillane et il favorisa en définitive les ambitions de Charles d'Anjou.
Il avait rapporté de la croisade une véritable auréole. Très sensible aux difficultés de l'Orient latin, il avait, dès 1237, aidé l'empereur byzantin en lui achetant fort cher les reliques de la Passion, pour lesquelles il fit construire dans son palais la « Sainte-Chapelle ». Depuis, il préparait la croisade et, voulant frapper au cœur la puissance musulmane, s'était embarqué (28 août 1248) pour l'Égypte. Vainqueur à Damiette (1249), mais vaincu et pris à Mansourah (1250), il dut verser rançon pour gagner la Syrie franque où il passa quatre ans à réorganiser l'administration et le système défensif qui assura quelques décennies de survie à l'Orient latin. Dans le même temps, parce qu'il croyait à l'intérêt d'une alliance pouvant prendre l'Islam à revers, il nouait des relations diplomatiques assez illusoires avec le successeur de Gengis khān, Qubilaï.
À son retour, il était en état d'intervenir efficacement dans les conflits qui opposaient les grands barons, voire les princes étrangers. Il s'entremit entre Flandre et Hainaut (« dit » de Péronne, 24 sept. 1256), entre Navarre et Bretagne, entre Bourgogne et Chalon, entre Bar et Lorraine, entre Savoie et Dauphiné.
Poursuivant l'habile politique matrimoniale de Blanche de Castille, grâce à qui Alphonse de Poitiers, frère du roi, régnait sur le comté de Toulouse, Saint Louis avait, dès 1246, obtenu pour son autre frère Charles d'Anjou la main de l'héritière de Provence. La conjonction des manœuvres d'Urbain IV et des ambitions de Charles conduisit le roi à accepter que son frère reçût la couronne de Sicile (1266). Cette intervention capétienne en Italie, qui allait impliquer la France dans la politique guelfe, est également responsable en partie des erreurs de la croisade de 1270. Mal conseillé, semble-t-il, par son frère qui souhaitait garantir les relations économiques entre la Sicile et Tunis, ignorant lui-même la situation interne de l'Islam et peu secondé par des barons qui n'aspiraient guère qu'au repos, Saint Louis prit la décision malheureuse d'attaquer Tunis. Bien plus, l'aide de Charles fit cruellement défaut : trop occupé en Italie, le frère du roi et ses barons n'arrivèrent en Afrique qu'après la mort de Louis, survenue le 25 août 1270. La force d'âme du roi mourant, dans un camp ravagé par la peste, fit plus pour sa renommée que n'eût fait une éphémère victoire.
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Écrit par
- Jean FAVIER : membre de l'Institut, directeur général des Archives de France
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