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SAINT-SAVIN-SUR-GARTEMPE

Le plus important et l'un des plus beaux ensembles de peintures romanes de France décore l'ancienne abbatiale de Saint-Savin-sur-Gartempe (Vienne). L'existence du monastère est attestée au moins depuis l'époque de Louis le Pieux, mais l'église fut reconstruite au xie siècle. Une nef, épaulée de collatéraux à peu près de même hauteur, est voûtée d'un berceau. Dans la partie orientale, celui-ci est continu et il repose sur cinq hautes colonnes. La partie occidentale, un peu plus ancienne, est divisée en trois travées par des doubleaux, et elle prend appui sur des piles en quatre-feuilles. Elle est précédée d'un clocher-porche, qui a été couronné d'une flèche au xive siècle. Un transept étroit, sur lequel se greffent deux absidioles, a sa croisée surmontée d'un second clocher nettement plus bas. Il est suivi d'un sanctuaire avec déambulatoire doté de cinq chapelles rayonnantes peu profondes. Pour la construction de ce chevet, on semble avoir tenu compte de l'existence de deux cryptes plus anciennes, l'une située sous la chapelle d'axe, l'autre sous le chœur.

Par suite de la disparition presque complète du décor du chevet, les peintures romanes sont conservées principalement en quatre endroits. Celles du porche sont consacrées à des visions de l'Apocalypse, au Christ de la Parousie et à la Jérusalem céleste. Elles se caractérisent par un rare dynamisme. Leur auteur est en outre un coloriste sensible. Une tribune située au-dessus a reçu un cycle de la Passion et de la Résurrection du Christ dont les scènes sont réparties autour du motif central de la Descente de croix. Elles s'accompagnent en outre de représentations de martyrs et de saints évêques de Poitiers. Ces peintures, d'excellente facture, possèdent une réelle qualité monumentale. Sur la voûte de la nef, une vaste suite d'images de l'Ancien Testament est distribuée selon un ordre strict, mais subtil, qui a mis en défaut la perspicacité des commentateurs jusqu'à ce qu'André Grabar en ait trouvé le fil directeur. Dans la crypte du chœur apparaît une quatrième série de peintures retraçant les scènes de la vie et du martyre de saint Savin et de saint Cyprien, en s'inspirant d'une Passio du xie siècle qui n'est guère que la somme d'emprunts faits à diverses autres vies de saints. Alors que dans la nef les silhouettes animées se dégagent avec netteté sur des fonds aérés, les figures de la crypte s'agglutinent en groupes compacts et mal différenciés.

Les variantes stylistiques que nous avons signalées ne sauraient dissimuler l'unité profonde de l'ensemble. Les peintures de Saint-Savin paraissent l'œuvre d'un atelier unique, où plusieurs tempéraments d'artistes collaborèrent pour faire surgir, autour de 1100, un style pleinement roman, à partir de traditions remontant à l'époque carolingienne.

— Marcel DURLIAT

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire de l'art à l'université de Toulouse-Le-Mirail

Classification

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